France

Twitter suspend brièvement le compte de Mila pour... «harcèlement»

Alors qu'elle était elle-même visée par des insultes sur Twitter, l’adolescente iséroise Mila a vu son propre compte suspendu pour «harcèlement». La plateforme est rapidement revenue sur sa décision devant l'émotion suscitée.

Mila, qui compte plus de 20 000 abonnés sur Twitter, a posté dans la soirée du 14 mars de vieux dessins d'enfance représentant divers objets, notamment un pain au chocolat, simplement accompagnés des mots «...ou chocolatine?». Un message anodin qui lui a pourtant valu d'être la cible de milliers de messages d'insultes et de menaces tels que «sale pute», «sale gouine», «sale islamophobe», a indiqué à l'AFP son avocat Richard Malka.

A l’hebdomadaire Le Point, Mila affirme avoir répondu à certains, traitant l'auteur de l'un d'eux de «puceau frustré». Dans la foulée, sur la page de son compte, une pastille blanche a remplacé quelques heures durant la photo de profil de la jeune fille, tandis que le message «Twitter suspend les comptes qui enfreignent les Règles de Twitter» s’affichait. «Hello, Mila, votre compte magicalorrs a été suspendu pour violation des règles de Twitter. Spécialement pour violation des règles contre le harcèlement. Vous ne pouvez pas cibler une personne et la harceler, ou inciter une autre personne à le faire. Sachez que si vous tentez de contourner cette mesure en créant un nouveau compte, nous le suspendrons immédiatement» : lui a signifié par mail l'entreprise américaine, rapporte Le Point.

Pour Maître Malka, la réponse de la jeune fille pourrait être à l'origine de sa suspension par le réseau. «C'est invraisemblable, elle n'est que victime», a-t-il relevé en dénonçant «une plateforme de l'arbitraire qui refuse d'appliquer les lois françaises, un réseau sans foi ni loi». «C’est comme si vous étiez agressé dans la rue et qu’on vous condamnait pour agression», a-t-il ajouté.

Interrogé par l'AFP, la société américaine a reconnu «une erreur». La décision d'intervenir a été «annulée et l'accès au compte a été rétabli». Ce qui était effectivement le cas en fin de matinée le 15 mars. La suspension a suscité bon nombre de réactions sur cette même plateforme.

L’écrivain Raphaël Enthoven a par exemple écrit : «Rendez-nous @magicalorrs ! Quand une femme est menacée de mort, c'est elle qu'on protège. Pas les assassins putatifs (attention, les cons : ceci n'est pas une insulte).#Mila»

Pour le secrétaire d'Etat chargé de la Transition numérique Cédric O, «le rétablissement du compte de @magicalorrs par @TwitterFrance intervient trop tard : la double peine pour #mila, constamment harcelée. Pour protéger les victimes en ligne, la régulation des réseaux sociaux est une priorité du @gouvernementFR.»

La vie de l'adolescente iséroise a basculé en janvier 2020, quand elle a publié une vidéo devenue virale dans laquelle elle proférait de virulentes critiques sur l'islam. «Le Coran il n'y a que de la haine là-dedans, l'islam c'est de la merde», disait-elle dans cette vidéo, initialement diffusée dans une discussion personnelle. Ses propos ont déclenché un déferlement de menaces, la contraignant notamment à quitter son lycée de Villefontaine. 

Après avoir été présentées à un procureur du pôle national de lutte contre la haine en ligne en février, cinq personnes âgées de 18 à 29 ans doivent être jugées le 3 juin par le tribunal correctionnel de Paris pour «harcèlement moral» et, pour deux d'entre elles, «menaces de mort».