France

Actrice nue sur scène, hommage à Adama Traoré : les César 2021 se transforment en tribune politique

Plusieurs comédiens ont profité de la cérémonie des récompenses du cinéma français pour passer des messages politiques. Corinne Masiero s'est déshabillée pour soutenir les intermittents, Jean-Pascal Zadi a quant à lui rendu hommage à Adama Traoré.

Un an après une cérémonie 2020 très agitée en raison de manifestations anti-Polanski, l'édition 2021 des César – les récompenses du cinéma français – était placée sous le signe des revendications, le 12 mars à Paris. La crise sanitaire et la fermeture des cinémas ont nourri la soirée, la scène de l'Olympia servant à plusieurs reprises de tribune pour le monde de la culture. L'image qui restera de l'événement, organisé en comité restreint du fait des restrictions sanitaires, est celle de Corinne Masiero. La comédienne, qui incarne capitaine Marleau à la télévision, a en effet marqué les esprits en ôtant un costume de Peau d'Ane sanguinolent, se retrouvant entièrement nue au moment de remettre le prix du meilleur costume.

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«No culture, no future» sur le ventre, «rends-nous l'art, Jean» sur le dos, avait-elle inscrit à l'attention du gouvernement de Jean Castex. «Maintenant, on est comme ça, tout nus», a-t-elle expliqué, tampons hygiéniques usagés aux oreilles, pour soutenir notamment les intermittents du spectacle.

J’ai envie de parler d’Adama Traoré

Autre moment de revendication lors du sacre de Jean-Pascal Zad, désigné meilleur espoir masculin pour la comédie Tout simplement noir (qu'il a écrit et réalisé avec John Wax) dont il tient le rôle principal. «Je remercie ceux qui ont ouvert la brèche avant moi», a-t-il déclaré à propos d'autres personnalités noires du cinéma français, citant notamment Omar Sy (César du meilleur acteur en 2012 pour Intouchables) et Ladj Ly (César du meilleur réalisateur en 2020 pour Les Misérables).

Jean-Pascal Zadi a expliqué que son film, qui a l'ambition de s'attaquer aux clichés racistes, parle «avant tout d'humanité». «Quand on parle d’humanité, on est en droit de se poser la question si l’humanité de certaines personnes n’est pas remise en cause […] J’ai envie de parler d’Adama Traoré, de Michel Zecler», a-t-il poursuivi. Connu des forces de l’ordre, Adama Traoré avait été interpellé le 19 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise (Oise). Il était décédé d’un syndrome asphyxique au cours de son arrestation, alors que les trois gendarmes avaient reconnu que le jeune homme avait «pris le poids de [leurs] trois corps au moment de son interpellation». Michel Zecler est un producteur de musique noir violemment frappé par des policiers en novembre 2020, une affaire qui avait relancé le débat sur les violences policières.

«On peut se demander si notre humanité compte lorsque l’esclavage a été retenu comme crime contre l’humanité en 2001 et qu’aujourd’hui, dans l’espace public, certaines personnes qui ont activement participé aux crimes contre l’humanité sont glorifiées par des statues», a développé Jean-Pascal Zadi. Après son passage sur scène, le comédien a expliqué à l'AFP que «c’était important pour moi de parler pour foutre la merde». «La scène des César est l’occasion de relancer ces histoires. On veut des réponses concrètes de la part de la justice, car j’ai l’impression que ça passe un peu sous les radars», a ajouté le lauréat.

Concernant le palmarès de cette 46e cérémonie, le film d'Albert Dupontel Adieu les cons a été le grand gagnant avec sept récompenses, dont celle du meilleur film, du meilleur réalisateur, du meilleur scénario original, du meilleur second rôle masculin (Nicolas Marié) et le choix des lycéens. La statuette de meilleur acteur est revenue à Sami Bouajila pour Un Fils, celle de meilleure actrice à Laure Calamy pour Antoinette dans les Cévennes, et celle de meilleure actrice dans un second rôle à Emilie Dequenne dans Les Choses qu'on dit, les choses qu'on fait.