Confirmant une information du magazine d'actualité Le Point, le parquet de Pontoise, dans le Val-d'Oise, a annoncé le 22 juillet que l'ancien co-détenu d'Adama Traoré, qui avait accusé celui-ci d'agressions sexuelles, a été indemnisé par le Fonds de garantie des victimes pour ces faits «reconnus comme avérés» par la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions (Civi).
Après examen des éléments de l'enquête auxquels a eu accès la Civi, cette juridiction spécialisée a déterminé que «la matérialité des infractions d'agressions sexuelles dénoncées doit être considérée comme établie». «L'indemnisation couvre l'ensemble des préjudices reconnus comme avérés et s'élève globalement à 28 793 euros», a détaillé le parquet de Pontoise. Cette indemnité, qui résulte d'une décision prise le 12 mars 2020 par la Civi, porte non seulement sur les faits présumés d'agressions sexuelles que l'ex-co-détenu d'Adama Traoré dit avoir subi en mai 2016 en prison, mais également sur des faits de violences dont a été victime le requérant, qui font suite à une décision rendue par le tribunal correctionnel en mars 2017.
Yacouba Traoré, un des frères d'Adama Traoré, avait été alors condamné à 18 mois de prison ferme pour avoir participé à une expédition punitive contre cet ancien co-détenu de son frère. Les faits, datés du 25 février, avaient été qualifiés par le procureur de «véritable guet-apens» et de «sauvage agression». Ce jour-là, la victime avait été rouée de coups dans le quartier Boyenval de Beaumont-sur-Oise.
La Civi travaille de façon autonome par rapport à d'autres procédures éventuelles devant des juridictions pénales. Elle peut être saisie même en l'absence de condamnation, notamment lorsque l'auteur présumé n'a pas pu être identifié ou est décédé. Après sa décision, c'est ensuite au Fonds de garantie des victimes que revient l'action d'indemniser le requérant. «Il s'agit d'une procédure à laquelle l'auteur présumé des faits n'est pas partie. Seul le juge pénal est compétent pour le déclarer, le cas échéant, coupable», a précisé à l'AFP le Fonds de garantie des victimes.
Au Figaro, celui-ci affirme qu'«indemniser la victime n'est pas ici une reconnaissance de culpabilité, mais plutôt un geste pour faire en sorte que la personne concernée le vive comme une forme de reconnaissance de ce qu'elle a subi.»
Le co-détenu contraint à des fellations sous la menace d'une fourchette ?
L'affaire remonte à 2016. L'individu, alors âgé de 23 ans, partageait la même cellule qu'Adama Traoré, 24 ans, à la maison d'arrêt d'Osny-Pontoise. Au mois de mai de la même année, la mère du co-détenu d'Adama Traoré décide de porter plainte au commissariat de Cergy-Pontoise, ne supportant plus de voir son fils en «extrême souffrance», selon le récit fait par Le Point. Ce n'est que quelques jours plus tard que la mère aurait découvert la nature des faits : «Dès que je l'ai vu, il s'est mis à pleurer. Je lui ai demandé ce qui se passait, il m'a répondu par deux fois : il m'a violé. Je lui ai demandé qui ? Il m'a dit mon ancien co-détenu, Adama Traoré.» Selon la même source, il n'y aura cependant pas d'enquête possible, le procureur de la République de Pontoise constatant l'extinction de l'action publique pour cause de décès le 14 septembre 2016.
La victime n'aurait rapporté à la justice avoir été victime de viol que le 6 septembre 2016. Selon l'hebdomadaire, il raconte alors aux enquêteurs «avoir été contraint, plusieurs fois par jour, de pratiquer des fellations à Adama Traoré, qui le menaçait à l'aide d'une fourchette». Il saisit la Civi de Pontoise le 28 décembre 2018 afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices. Après s'être réunie en décembre 2019, la Commission ne rendra sa décision favorable à un dédommagement que le 12 mars 2020.