L'écrivain Renaud Camus, âgé de 74 ans, a été relaxé ce 10 février par le tribunal correctionnel de Paris alors qu’il était poursuivi pour injures raciales après la publication d'un tweet le 18 avril 2019, rapporte l’AFP.
Dans le tweet mis en cause, l’auteur écrivait : «Une boîte de préservatifs offerte en Afrique c'est trois noyés en moins en Méditerranée, cent mille euros d'économie pour la Caf, deux cellules de prisons libérées et trois centimètres de banquise préservée.»
Pour le tribunal en charge de l’affaire, si le style et les images de l'écrivain peuvent manquer «d’empathie» et «choquer et heurter la délicatesse», ils «relèvent du choix du mode humoristique pour traiter par l'absurde d'un sujet politique, et dramatique, dans le cadre d'un tweet propice à une concentration du propos autour de formules choc». Avec cette «critique satirique d'un système de croissance et de certaines de ses conséquences», Renaud Camus n'a pas dépassé les «limites admissibles» du libre-exercice de la liberté d'expression, selon le tribunal cité par l'AFP.
L’autorité judiciaire considère également que le propos incriminé «s’insère dans un débat d'intérêt général relatif à la décroissance démographique» et qu'il s'intègre en outre «dans une récurrence de tweets» postés par Renaud Camus entre 2015 et 2020, «prenant position de manière générale pour un contrôle des naissances sur l'ensemble de la planète y compris en Europe».
Le parquet avait requis quatre mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende pour injure raciale. Le procureur avait estimé, en novembre dernier, que le tweet de Renaud Camus réduisait la population africaine à des «choses» et des «chiffres», ce qui constituerait un «procédé éprouvé d'une rhétorique raciste». «Les mots sont choisis, la phrase est construite, pour mieux humilier, diviser et convaincre de cette division», avait-elle ajouté.
Stéphane Lilti, avocat des associations J'accuse et Union des étudiants juifs de France (UEJF), qui s'étaient constituées parties civiles, avait jugé qu'il y avait dans le tweet de l'écrivain une atteinte directe à la dignité des populations visées.
Renaud Camus avait quant à lui fait valoir la dimension «humoristique et caricaturale» de son tweet, «dans la limite des 280 caractères» et avait précisé «apprécier très profondément beaucoup de caractères de la civilisation africaine».
Faisant référence à sa relaxe, l’écrivain a publié un nouveau tweet ce 10 février, dans lequel il insiste sur la dimension mondiale de la question démographique, en précisant qu’il ne pensait pas que la croissance de la population africaine soit seule responsable des maux de la planète.
«Remigration» et «grand remplacement»
Renaud Camus, dont le parti de l'In-nocence avait appelé à voter Marine Le Pen en 2012, avait conduit une liste aux élections européennes de 2019, La ligne claire, au côté du président de la formation Souveraineté, identités et libertés (SIEL) Karim Ouchikh. Cette liste préconisait notamment une réduction drastique du développement de l'islam en France et la «remigration», c'est-à-dire l'encouragement pour les immigrés extra-européens et leurs descendants à quitter la France pour leur pays d'origine. Renaud Camus avait finalement désavoué cette liste, après la diffusion d'une photo de sa colistière, Fiorina Lignier, traçant une croix gammée dans le sable.
L'écrivain, qui pourfend immigration et incivisme, est connu du grand public pour sa défense de la thèse du «grand remplacement» qui postule que les populations européennes, majoritairement chrétiennes, sont progressivement remplacées par des populations afro-maghrébines majoritairement musulmanes.
Renaud Camus a par ailleurs été condamné à plusieurs reprises pour provocation à la haine. En 2014 notamment, la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris l'avait condamné à 4 000 euros d'amende pour des propos qui constituaient «une très violente stigmatisation des musulmans, présentés comme des “voyous”, des “soldats”, “le bras armé de la conquête”» – une peine confirmée en appel un an plus tard en 2015. Renaud Camus s'était défendu en assurant qu'il avait désigné «exclusivement» les «délinquants» parmi les musulmans.