France

«Macron crée un numéro vert de plus» : l'opposition pas convaincue sur les violences policières

Emmanuel Macron a évoqué pour Brut les violences commises par des forces de l'ordre mais aussi par des citoyens. L'Etat va notamment lancer une plateforme internet et mettre à disposition un numéro vert, sans convaincre l'opposition qui ironise.

Au cours d'un entretien pour le média Brut le 4 décembre, Emmanuel Macron a évoqué les violences en France commises par les forces de l'ordre ou par des citoyens. Il a tout d'abord rappelé que rien ne «justifiait les violences», même si celles-ci étaient commises par des forces de l'ordre.

Sur l'affaire Michel Zecler, il a confessé que ce qui lui faisait «honte», était le fait «que les policiers n’aient pas été exemplaires». «Il n'y a rien qui excuse [la violence], ce qui m’a fait honte ce sont les faits, au-delà des images», a-t-il ajouté, précisant qu'il avait vu, lors de la marche pour les libertés le 28 novembre dernier, «des images [tout] aussi graves». Il a ainsi déploré qu'une commissaire de police se soit «fait rouer de coups», et «attaquée par des fous», par «des gens ensauvagés».

Emmanuel Macron a de fait reconnu qu'il existait «des violences par des policiers», expression qu'il a dit préférer à celle de «violences policières, qui est selon lui devenue un slogan».

«Je n'ai pas de problème à répéter le terme de violences policières mais je le déconstruis [car] c'est devenu un slogan pour des gens qui ont un projet politique. Il y a des policiers qui sont violents [et] qu'il faut sanctionner», a-t-il martelé. Qu’il y ait un «racisme consubstantiel dans la police, c’est faux», a-t-il d'ailleurs fait remarquer.

 «Il y a du racisme dans la société c’est un fait, [...] la police est à l’image de la société», a-t-il par ailleurs argumenté, en demandant aux journalistes sur le plateau de penser aux «95% des policiers qui se sont engagés, [avec] le sentiment d’injustice» qu'ils peuvent ressentir si la société «parle de violences policières».

Selon le président, si la société est en outre «devenue de plus en plus violente», c'est en grande partie à cause des «trafics». «Il y a de la violence urbaine qui s’est installée et accrue», a-t-il poursuivi.

Il en est venu aux problèmes «non réglés» de discriminations. Pour les résoudre, Emmanuel Macron assure que les forces de l'ordre disposeront «à partir de juin», de caméras piétons. Une plateforme nationale de signalement des discriminations, gérée par l'Etat, le défenseur des droits et des associations, sera aussi lancée en janvier. D'autre part, un numéro d'appel sera mis à disposition pour les citoyens afin d'échanger et signaler des problèmes de discriminations. Un grand sondage aura également lieu. «Les gens pourront aller dire en quoi ils sont discriminés», a-t-il expliqué.

«Aujourd'hui quand on a une couleur de peau qui n'est pas blanche, on est beaucoup plus contrôlé [..] On est identifié comme un facteur de problème et c'est insoutenable», a regretté le chef de l'Etat.

Sur les réseaux sociaux, la gauche a été particulièrement virulente contre l'intervention du président. Le député de La France insoumise (LFI) Bastien Lachaud constate qu'Emmanuel Macron «découvre l'existence des violences policières qu'il niait depuis 3 ans». «Sa réponse ? Retirer le projet de loi sur la sécurité globale, réformer l'IGPN, revoir la formation et la doctrine d'emploi de la police ? Mais non bien sur ! Un NUMÉRO VERT contre les discriminations !», se moque-t-il.

Tout aussi moqueur, le chef de file des députés LFI Jean-Luc Mélenchon : «Ah Macron crée un numéro vert de plus. Police, justice, et "pitoussa" : c'est réglé. C'est pas un gouvernement c'est une plateforme téléphonique. Oui mais le numéro est vert. Le climat aussi est sauvé.»

La sénatrice du Parti socialiste Marie-Pierre de La Gontrie se questionne également sur les solutions : «Comment Macron peut-il sérieusement penser que la réponse aux discriminations dans les contrôles d'identité peut-être... une plateforme et un sondage !» «Quel renoncement», poursuit-elle.

L'eurodéputé du Rassemblement national Gilbert Collard voit pour sa part d'un mauvais œil la nouvelle plateforme : «Avec ces plateformes délatrices, Macron instaure un régime de délation alors que pour les plaintes, il y a le procureur : si j’étais policier, je me sentirais bien seul avec Macron comme Président !»

Sans surprise, la députée La République en marche de la Drôme, Mireille Clapot, est en revanche enthousiaste : «Oui, le citoyen doit avoir un moyen simple et accessible de signaler les manquements de la police. Il n'en aura que plus confiance en elle. Ravie de l'émergence de cette idée [...] Merci Emmanuel Macron.»