A deux jours de l'arrivée d'une étape du Tour de France à Lyon, son maire fraîchement élu, Grégory Doucet, étiqueté Europe Ecologie Les Verts (EELV), n'a pas mâché ses mots pour étriller la Grande boucle. Dans Le Progrès du 10 septembre, l'élu énonce une longue critique, déclarant en introduction que «la machine Tour de France [lui] posait question».
S'il confesse ainsi que «c’est une épreuve qui porte de belles valeurs sportive», plusieurs points le «dérangent», comme le fait que «le tour de France continue à véhiculer une image machiste du sport». Machiste le Tour ? Pourtant, dans cette édition 2020, les organisateurs ont accepté une revendication des lobbies néoféministes, en supprimant le poste d'une hôtesse sur le podium, afin de respecter la parité. Désormais, c'est donc un homme et une femme – et non plus deux miss – qui épaulent, sur scène, les différents lauréats d'une étape. Cela n'empêche pas Grégory Doucet de blâmer : «Quand on défend les valeurs du sport, on défend l’égalité femmes-hommes».
Il ajoute d'ailleurs qu'«il devrait y avoir un Tour de France féminin depuis longtemps». «C’est la dernière épreuve sportive d’envergure qui n’a pas franchi le pas», avance-t-il. La championne française, Jeannie Longo (triple maillot jaune du Tour de France), appréciera. Il a en effet existé sous divers noms depuis 1984. Si aucune grande course par étape n'a été organisée depuis 2017 (à cause notamment de conflits entre les organisateurs et les instances internationales ou en raison d'un problème certain de médiatisation), Amaury Sport Organisation (qui organise le Tour de France masculin) va bel et bien relancer l'idée d'une Grande boucle féminine. Compte tenu du temps de préparation, elle aura lieu en 2022.
Le Tour de France se doit-il d'être écologiste au sens d'EELV ?
Au-delà du supposé «machisme», Grégory Doucet dénonce également, «l’empreinte écologique du Tour» : «Le Tour n’est pas écoresponsable. Combien de véhicules à moteur thermique circulent pour faire courir ces coureurs à vélo ? Combien de déchets engendrés ? Il n’est plus acceptable aujourd'hui d’avoir des grandes manifestations sportives dont la première priorité n’est pas de se poser la question de leur empreinte. Tous les petits objets, les goodies, les machins qui sont jetés par la caravane doivent maintenant être repensés pour être durables ou ne pas être jetés du tout.» Le Tour de France, selon EELV, sera-t-il sans caravane de voitures, de chars décorés, sans lancers de «petits objets» qu'affectionnent tant le public sur le bord de la chaussée ? Le Tour de France risquerait alors de perdre son côté populaire.
D'autre part, Grégory Doucet s'attaque aux sponsors qui financent en partie la plus grande compétition de la petite reine : «Quand je vois qu'[...] il y a Inéos, la plus grosse entreprise qui a investi dans les hydrocarbures sur la planète ou Total qui n’a pas vraiment compris que la France était à l’initiative des accords de Paris, en train de se refaire une image à coup de green-washing, je me dis que ce n’est pas possible. Si l’image de l’entreprise est cohérente avec la pratique, qu’elle est exemplaire et qu’elle le donne à voir, je n’ai pas de problème avec le business.»
Et l'édile lyonnais de prévenir la direction du Tour, se montrant défavorable à ce qu'il revienne dans la capitale des Gaules si une réforme écologique n'est pas à l’œuvre : «Je veux des garanties que les événements que l’on accueille dans notre ville se montrent responsables à l’égard de la planète. Tant que l’on n’aura pas creusé ce sujet-là, le dossier ne va pas revenir sur ma table.»
N'est-ce pas finalement une ironie : la plus grande compétition de vélo est pointée du doigt par l'un des promoteurs de la bicyclette...
Bastien Gouly