France

Prime aux policiers de nuit : un syndicat de «nuiteux» dénonce des «miettes»

En colère contre les organisations syndicales majoritaires du secteur et le gouvernement, le syndicat Option Nuit, qui représente les travailleurs nocturnes, s'estime floué par les récentes négociations et appelle à la mobilisation.

Accompagné de Gérald Darmanin, de Marlène Schiappa et de Didier Lallement, Emmanuel Macron a rendu visite aux policiers nationaux travaillant de nuit dans les XVIIe et XVIIIe arrondissements de Paris le 27 juillet : une manière d'enterrer la hache de guerre avec la colère policière qui s'était librement exprimée au mois de juin ? Lors de ces rassemblements, des membres des brigades anticriminalité de nuit étaient venus grossir les rangs des fonctionnaires massés dans les lieux symboliques de la capitale, gyrophares des véhicules de service tournoyant dans la nuit parisienne.

Lors de cette visite surprise du président de la République au chevet des «hiboux», ainsi qu'on les surnomme également, une annonce a été faite : le versement d'une nouvelle indemnité de 10 millions d'euros spécialement destinée aux travailleurs de nuit de la police nationale, soit 50 euros par mois et par agent. 

Le communiqué de Beauvau explique : «Cette indemnité vise notamment à accompagner une pénibilité plus forte liée au travail de nuit et le passage à des cycles de travail augmentant la présence des policiers sur le terrain. Le coût de cette indemnité, de 10 millions d’euros, sera prévu dans le projet de loi de finances pour 2021.»

Ce que vous venez de faire est honteux

Si cette revendication correspond bien à une demande de la part des plus grands corps intermédiaires du secteur, qui avaient récemment axé leur communication syndicale sur les «nuiteux», le syndicat Option Nuit, créé au mois de juin et spécialement dédié aux travailleurs nocturnes, a fait savoir dans la nuit du 27 au 28 juillet que pour lui, «le compte n'y est pas»... Car les travailleurs de nuit attendaient 37 millions d'euros et non dix. Du rififi entre les géants du secteur et les petits nouveaux ?

William Maury, secrétaire général de l'organisation, a fait savoir dans un message cinglant (dont RT France a eu connaissance) adressé à un des grands syndicats du secteur, en l'occurrence Unité-SGP : «En qualité de secrétaire général d'Option Nuit, je retire ma carte immédiatement de votre organisation syndicale qui vient de vendre les nuiteux de la police nationale. Le secrétaire général adjoint Guillaume Neau retire également son adhésion à votre organisation. Ce que vous venez de faire est honteux. Les nuiteux solidaires sont prêts à quitter votre organisation.»

Cette annonce vient de déclencher la colère des Nuiteux de la Police nationale

La colère est également palpable dans un communiqué de presse publié par cette organisation de policiers de la base, sans détachement syndical et travaillant donc effectivement dans leurs services. Un message qui appelle à une mobilisation des travailleurs de nuit : «Cette annonce vient de déclencher la colère des Nuiteux de la Police nationale, et en particulier des 12 000 policiers travaillant la nuit ayant rejoint le mouvement Option Nuit. 20 ans sans revalorisation, cinq ans de réunions pour ça ! [...] Une proposition honteuse qui montre bien la méconnaissance du travail des Nuiteux et des conséquences sur nos vies. Le compte n'y est pas, Option Nuit appelle à la mobilisation des hiboux ! Le ministre de l'Intérieur refusant toujours d'écouter les Nuiteux, nous allons donc devoir nous faire entendre.» 

Démontrant la détermination des «nuiteux» après ces annonces mal accueillies par certains fonctionnaires de la base, Option Nuit a posté sur son compte Twitter la vidéo d'un nouveau rassemblement : «Les Hiboux commencent à hululer face aux miettes que vous venez de lancer aux Nuiteux», lit-on en accompagnement.  

Faut-il s'attendre à un regain de colère policière pendant l'été ? Après un long mois de grogne dans les rangs de la police, les médias sauront-ils se saisir de cette très forte demande de la part de la base, parfois court-circuitée par les grands syndicats du secteur ? Affaire à suivre, mais en tout état de cause, les «hiboux» ne semblent pas près de mettre fin à leurs hululements.

Antoine Boitel