L'arrivée du pénaliste Eric Dupond-Moretti au ministère de la Justice crée des remous. Le 11 juillet, Jean-Luc Lennon, procureur de la République de Basse-Terre, annonce ainsi souhaiter être «déchargé de ses fonctions».
Contacté par l’AFP, Jean-Luc Lennon fait valoir une «clause de conscience». «C’est une décision tout à fait personnelle qui n’engage que moi», souligne Jean-Luc Lennon, qui rappelle que, «comme d’autres magistrats, [il] milite depuis longtemps pour l’indépendance du ministère public». Cette «indépendance tarde à venir», a-t-il notamment expliqué sur Radio Caraïbes International.
Eric Dupond-Moretti, ancien avocat, a pourtant assuré le 7 juillet lors de la passation de pouvoir avec Nicole Belloubet vouloir «avancer sur un projet qui [lui] tient à cœur : l'indépendance de la justice». Il «souhaite être le garde des Sceaux qui portera enfin la réforme du parquet tant attendue».
Selon Jean-Luc Lennon, «un procureur de la République a vocation à appliquer dans le ressort de sa juridiction la politique pénale qui est déterminée par le gouvernement qui est portée par le garde des Sceaux» et «le procureur de la République doit être aussi en conscience, en capacité de le faire avec loyauté».
«A partir du moment où vous estimez que les conditions ne sont plus remplies pour le faire pour des raisons qui m’appartiennent, [...] j’ai considéré que je ne serais plus un bon procureur de la République si tant est que j’en étais un», a-t-il argumenté sur la radio guadeloupéenne, assurant qu'il ne pourrait «pas travailler sereinement» avec l'actuel garde des Sceaux. «Et par conséquent c’est la voie que j’ai choisie, de demander à ce que je puisse être déchargé de ces fonctions qui par ailleurs sont des fonctions auxquelles j’ai toujours aspiré et auxquelles je crois profondément», a-t-il ajouté.
Cette décharge, qui fera l’objet d’un décret attendu «dans les semaines à venir», selon Jean-Luc Lennon, doit lui permettre de revenir dans son lieu d’affectation initial qui est le parquet général.
Le ministère de la Justice a réagi auprès de l'AFP en soulignant que, lors du discours de passation, Eric Dupond-Moretti avait expliqué «qu’il n’était en guerre avec personne». Le garde des Sceaux «recevra d’ailleurs prochainement les organisations représentatives des magistrats afin d'engager un dialogue constructif et apaisé», a-t-on ajouté.