France

Noms de rue : Ndiaye favorable à ce qu'on «pose la question» de certains personnages historiques

Alors que le président a fermement balayé l'idée de faire disparaître des noms de personnages historiques de l'espace public, Sibeth Ndiaye s'est montrée favorable à une «discussion historiographique» sur certains d'entre eux.

Invitée le 15 juin sur France inter à revenir sur les récentes controverses à propos de la place de personnages historiques controversés dans l'espace public, la porte-parole du gouvernement s'est montrée favorable à la remise en question de certains d'entre eux. 

«Il y a des personnages historiques, et on en a connus pendant la Seconde Guerre mondiale, qui certes ont eu une vie avant la Seconde guerre mondiale mais compte tenu des choix qu'ils ont faits pendant la Seconde guerre mondiale n'ont plus leur place autre part que dans les livres d'histoire», a déclaré la porte-parole de l'exécutif.

Cette dernière répondait à une question de Léa Salamé qui lui demandait s'il fallait débaptiser l'avenue Bugeaud dans le 16e arrondissement de Paris, voie baptisée en hommage au maréchal Thomas Robert Bugeaud (1784-1849) qui mena une politique particulièrement brutale pour la population lors de la colonisation de l'Algérie. Il a notamment mis en place une «politique de la terre brûlée» avec notamment des «enfumades» (pour asphyxier des personnes réfugiées dans une grotte), selon l'historien Benjamin Stora.

«L'avenue Bugeaud on pose la question», a confirmé Sibeth Ndiaye, relancée une nouvelle fois sur ce sujet par son interlocutrice. 

Une «discussion historiographique»

Sibeth Ndiaye a déclaré qu'il fallait une «discussion historiographique» pour «certaines personnalités», en se gardant de juger avec «émotion» ces questions. 

Cette résolution semble trancher avec les propos fermes du président tenus la veille lors de son allocution : «La République n'effacera aucune trace ni aucun nom de son histoire, elle n'oubliera aucune des ses œuvres, elle ne déboulonnera pas de statues. Nous devons plutôt lucidement regarder ensemble toute notre Histoire, toutes nos mémoires», avait-il déclaré. Le chef d'Etat avait par ailleurs condamné la «réécriture haineuse ou fausse du passé».

Cette prise de position intervient alors que certains militants et figures médiatiques réclament que l'on fasse sortir de l'espace public certains personnages historiques pour des épisodes jugés inacceptables de leur passé. Ainsi, l'ancien Premier ministre socialiste et actuel président de la Fondation pour la mémoire de l'esclavage, Jean-Marc Ayrault, a émis le souhait que les lieux baptisés du nom de Colbert à l'Assemblée nationale et à Bercy soient rebaptisés en raison de son rôle dans la création du Code noir (1685). 

Plus tôt, des militants de la controversée Ligue de défense noire africaine avaient réclamé la disparition de l'espace public des références à Colbert, au général De Gaulle ou à Napoléon pour leur racisme supposé ou leur rôle dans la colonisation et l'esclavage. D'autre figures historiques honorés par la République, tels Jules Ferry (pour son éloge du colonialisme), font l'objet de remises en question similaires depuis plusieurs années.

Cette volonté de déboulonnage de figures historiques fait écho au déboulonnage ou à la vandalisation, aux Etats-Unis, de statues sur fond de mouvement de protestations antiracistes après la mort de George Floyd. Des scènes similaire ont eu lieu Royaume-Uni ou en Italie. En France, une statue du général De Gaulle et une plaque commémorative de la bataille de Bir Hakeim (opposant les Alliés, dont la France libre, au IIIe Reich en 1942) ont été vandalisées en Seine-saint-Denis, sans que l'on sache si cette dégradation s'inscrit dans ce mouvement de contestation antiraciste.