Comme a pu le constater une équipe de RT France sur place, une dizaine de personnes ont été verbalisées le 13 juin alors qu'elles s'étaient retrouvées devant des locaux parisiens de la Commission européenne afin de dénoncer la politique «mortifère» de l'institution. Au delà des neuf participants verbalisés, deux reporters de terrain du Média pour tous ont également dû décliner leur identité dans le cadre d'une procédure de contravention, faute d'avoir pu présenter une carte de presse. L'opération policière a mobilisé un nombre d'agents largement supérieur à celui des citoyens réunis pacifiquement : près de 20 binômes à moto faisaient partie de l'équipe d'intervention.
Un des participants a confié à RT France le mot d'ordre qui avait circulé en amont de ce rendez-vous dans le VIIe arrondissement de la capitale, expliquant qu'il n'avait pas fait l'objet d’une déclaration préalable à la mairie ou la préfecture.
Quand je manifeste pour la France, pour la patrie, je suis verbalisée !
«L'idée était de dénoncer le fait que l'UE et notre gouvernement ont pris des décisions qui ont fait des ravages», détaille-t-il, avant d'évoquer «la destruction de pans entiers de l'économie et de l'industrie françaises». «Nous n'avons pas fini d'en subir les conséquences», a-t-il estimé encore. Même discours tenu sur place par Fati, autre participante, dont un court extrait vidéo a été partagé après l'intervention policière.
«On est venus dénoncer cette politique mortifère qui divise les nations, avec un message très fort : le Frexit», a par exemple déclaré la militante, un gilet fluo en main sur lequel elle avait préparé une illustration pour résumer ses propos. Dans la même vidéo, quelques secondes avant le départ de l'équipe motorisée des forces de l'ordre, Fati évoque la verbalisation collective des personnes sur place. «On n'était même pas une dizaine de personnes, on s'est pliés à leur jeu et on a décliné nos identités, ça s'est bien passé», a-t-elle confié non sans amertume. «Quand je manifeste pour la France, pour la patrie, je suis verbalisée ! Voilà le message qu'ils nous envoient.»
«On était venus pour échanger sur le Frexit, mais aussi sur le RIC», nous a expliqué un autre manifestant présent sur place. «Les policiers étaient quatre fois plus nombreux que nous. C'est honteux, on s'en prend à neuf citoyens qui discutent pacifiquement sur un trottoir alors qu'au même moment, il y a un rassemblement d'ampleur que le gouvernement a autorisé en justifiant l'émotion du moment. Et nous, on ne peut pas faire valoir l'émotion des vies anéanties et des destructions de nos territoires par les politiques de l'UE ?», s'est encore interrogé ce Français venu avec son drapeau tricolore.
Eux n’ont pas eu la chance d’émouvoir Castaner
L'événement a eu lieu le jour même de la suspension de l'interdiction des rassemblements de plus de 10 personnes, annoncée par le Conseil d'Etat. En outre, il s'est déroulé quasi simultanément avec le rassemblement contre le racisme et les violences policières, organisé le même jour de l'autre côté de la capitale, place de la République. Un rassemblement qui n'a pas donné lieu à des verbalisations dans le cadre de l'interdiction de rassemblement de plus de 10 personnes pour raison sanitaire.
Si certains ont annoncé leur intention de contester leur verbalisation sur la base du nombre restreint des personnes rassemblées, les faits ont d'ores et déjà été commentés par certaines personnalités politiques. «Quand l'expression politique est muselée. Macron choisit ses opposants», a par exemple estimé dans un tweet Benjamin Cauchy, porte-parole du parti politique Debout la France. «Eux n’ont pas eu la chance d’émouvoir Castaner», a pour sa part estimé Florian Philippot, fondateur des Patriotes.
L'épisode n'a pas amoindri l'autosatisfaction affichée dans la journée sur le compte Twitter (en français) de l'exécutif européen au sujet de son action politique. Bruxelles n'a pour l'heure pas réagi à la verbalisation des citoyens ayant fait le déplacement devant ses locaux parisiens.
Fabien Rives