France

Emmanuel Macron adresse ses traditionnels vœux à la presse

Après avoir fait l'impasse en 2019, le président de la République présente ses vœux 2020 à la presse. Entre la réforme des retraites, les Gilets jaunes et la polémique sur les violences policières, le discours d'Emmanuel Macron est forcément attendu.

Mercredi 15 janvier

Emmanuel Macron a annoncé qu'il n'y aura pas de questions de la salle. Les vœux sont terminés, merci de les avoir suivis.

Emmanuel Macron fait remarquer la «concurrence entre deux modèles» : «Un modèle anglo-saxon qui veut donner le primat à la diffusion et qui considère qu'on peut éradiquer tout ce qui relève d'une production indépendante de contenu [...] et de l'autre côté, un modèle français – car nous sommes les principaux et parfois seuls à les défendre : les auteurs, les journalistes, les reporters, les photographes.»

«Sur ce sujet, nous ne devons rien céder», affirme-t-il.

La loi contre les fausses informations en période électorale n'est pas, selon Emmanuel Macron, «une menace pour votre profession».

«Ce n'est pas au gouvernement de dire qui est journaliste, qui ne l'est pas, quel est le statut de l'information, etc.», poursuit-il. «Mais la société du commentaire permanent n'est pas la société de l'information», ajoute-t-il, y voyant «une menace pour la démocratie» en mentionnant la «multiplication des auteurs possibles, de traces ou de simili journalistiques».

«Si chacun dans la rue peut faire du journalisme avec son téléphone portable sans qu’on puisse savoir qui, comment et à quel moment, alors il n’y aura plus de journalistes», déclare Emmanuel Macron lors de ses vœux à la presse.

Emmanuel Macron constate que «nous sommes collectivement confrontés à une lutte, celle contre les fausses informations». Il atteste que la loi de 1881 est dépassée pour lutter contre celles-ci car, à l'époque selon lui, des élections ne se sont pas fait «manipuler et de manière établie par des attaques sur les réseaux sociaux et des détournements d'information».

Emmanuel Macron défend «la régulation» du monde médiatique : «Historiquement, elle vous a protégés.» Il évoque ainsi une protection «pour la liberté de la presse» en permettant la distinction «entre ce qui est de la presse et ce qui ne l'est pas».

«Il y a une violence de rue qui s'est installée dans notre pays [...] il nous faut évidemment la réprimer, la combattre avec beaucoup de clarté, la sanctionner à chaque fois qu'elle existe [...] il nous faut aussi en comprendre les prémices», argumente le président.

Commentant la «liberté de blasphème», le chef de l'Etat explique : «Je souhaite que notre pays continue de ne pas céder à [...] l'esprit de lapidation ou à cette forme d'ordre moral autoproclamé». Il souhaite qu'«on puisse continuer de critiquer très librement toute forme politique, toute forme de religion, tout Etat».

«Je ne connais aucun policier ou gendarme qui s'engage dans les forces de l'ordre pour être violent. Il y a une violence de rue qui s'est installée dans notre pays, dont on vu les traces au moment de l'évacuation de Notre-Dame-des-Landes et qui s'est largement développée depuis. Je serai intraitable à ce sujet, mais il faut aussi comprendre comment un tel nihilisme peut saisir certains de nos concitoyens.», explique le président de la République.

Il ajoute : «Il importe d'exiger [des forces de l'ordre] le respect de toute la déontologie et de l'exemplarité. Les journalistes doivent être protégés de la violence pour qu'ils puissent être capables de faire leur métier comme ils doivent le faire.»

Cette liberté est aussi «bousculée par la pression, les effets de foule qui accompagnent les réseaux sociaux», affirme le chef de l'Etat, en déplorant «une forme d'ordre moral qui accompagne notre époque» sur des «questions» ou des «causes».

«L'information est une affaire de professionnels», ajoute Emmanuel Macron qui assure que les «défis ne sont pas minces» en évoquant, en premier lieu, la «menace qui pèse sur la liberté de la presse» dans le monde.

«En mettant en scène les grands débats que traversent la société [...], vous faites œuvre de civilisation en empêchant que les seules passions s'emparent de l'espace public et que, finalement, le peuple se réduise à l'état de foule», poursuit Emmanuel Macron devant les journalistes.

«Cette fonction est sans doute aujourd'hui plus importante que naguère», soutient-il.

Emmanuel Macron explique que la presse doit faire face à un monde de «plus en plus compliqué», avec une «concurrence déloyale non seulement des plateformes et, au fond, de chaque citoyen qui devient potentiellement un journaliste ou un photographe [...] non réglementé».

Olivier Bost fait part de son scepticisme sur plusieurs actions gouvernementales : la loi sur le secret des affaires, la loi sur les fake news  le conseil de déontologie.

Le journaliste de RTL et président de l'Association de la presse présidentielle, Olivier Bost, interpelle le président sur ses «jugements très sévères à l'égard de la presse» : «Vous avez eu des mots incompréhensibles comme ceux-ci : "Nous avons une presse qui ne cherche plus la vérité."»

«Nous ne sommes jamais irréprochables, c'est vrai, vous pouvez critiquer notre travail mais la profession n'a surtout pas besoin, et en particulier dans cette période, d'être attaquée et disqualifiée», déclare Olivier Bost.

Après un exercice traditionnel effectué en 2018, Emmanuel Macron présente de nouveau ses vœux à la presse ce 15 janvier. En 2019, le chef de l'Etat n'avait effectivement pas présenté ses vœux aux corps constitués ou à la presse afin de se concentrer sur le «grand débat national». Un an après, le climat social est toujours tendu avec l'explosive réforme des retraites ou encore la crise sociale pérenne des Gilets jaunes.

L'intervention d'Emmanuel Macron sera donc particulièrement scrutée. Le président de la République aura l'occasion d'évoquer ses rapports avec le monde médiatique. L'Elysée, qui souffle le chaud et le froid avec une partie de la presse, n'a par exemple pas répondu à la demande d'accréditation de RT France pour cette cérémonie.

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