Ce 3 décembre, le CSA annonce avoir mis en demeure la chaîne CNews de respecter ses obligations, notamment en matière d'incitation à la haine ou à la violence, après les propos du chroniqueur Eric Zemmour sur l'islam et la colonisation de l'Algérie, tenus dans l'émission Face à l'info.
Dans les procédures du CSA, une telle décision peut précéder, en cas de manquements répétés, une sanction qui peut aller de la suspension temporaire d'un programme à un retrait de l'autorisation de la chaîne, en passant par des amendes ou encore des privations d'écrans publicitaires.
Dans un communiqué, le groupe Canal+ a annoncé «saisir le Conseil d’Etat de ces questions fondamentales conditionnant l’existence même du pluralisme de la presse». Invoquant le principe de «liberté d'expression», le groupe audiovisuel juge que les propos d'Eric Zemmour «s’inscrivaient directement dans le cadre de l’expression du pluralisme des courants de pensées et d’opinions» et que le débat «respectait l’équilibre entre les idées et les opinions des deux contradicteurs même si celles-ci se sont exprimées avec vivacité et ont pu "heurter, choquer ou inquiéter"».
Le journaliste, essayiste et polémiste, est devenu mi-octobre la tête de gondole de Face à l'info, une nouvelle émission quotidienne de CNews, lancée peu après la polémique déclenchée par son discours sur l'islam et l'immigration, fin septembre, lors de la convention de la droite, organisée par des proches de Marion Maréchal Le Pen. Et plusieurs de ses interventions dans l'émission présentée par Christine Kelly, ancienne sage du CSA, ont suscité des polémiques. C'était le cas de celle du 23 octobre, dans laquelle Eric Zemmour avait assimilé l'islam et l'islamisme, avant d'évoquer la colonisation de l'Algérie en se déclarant, en tant que Français, «du côté» du général Bugeaud qui, lorsqu'il «arrive en Algérie, [...] commence à massacrer les musulmans et même certains juifs».
Des propos perçus comme «une légitimation de violences commises par le passé»
Pour le CSA, ces propos dérogent à plusieurs des obligations de la chaîne, découlant de la loi et de sa convention conclue en 2005 (un texte qui codifie ses engagements vis-à-vis du régulateur). En effet, le «gendarme de l'audiovisuel» juge que ces propos «ont pu être perçus» comme «une légitimation de violences commises par le passé à l'encontre de personnes de confession musulmane mais aussi comme une incitation à la haine ou à la violence à l'égard de cette même catégorie de la population». Et il considère que la séquence exprimait un «rejet insistant des personnes musulmanes dans leur ensemble, tendant à encourager des comportements discriminatoires en raison de la religion».
En outre, le régulateur estime que CNews, en diffusant ces propos en direct «sans réaction ni même modération» de la part de la journaliste Christine Kelly, a manqué à son obligation de garder la maîtrise de son antenne, qui s'impose en toutes circonstances. Le groupe Canal+ avait déjà, depuis le 29 octobre, décidé de diffuser l’émission Face à l’info en différé. Une décision conforme à la préconisation du comité d'éthique du groupe, à la suite des polémiques soulevées par les propos d'Eric Zemmour.
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