Le Sénat français a adopté le 30 octobre au soir une proposition de résolution, portée par le sénateur centriste Olivier Cadic pour un renforcement des sanctions contre «des responsables des violations des droits de l'Homme au Venezuela», et appelant la France à soutenir le dossier en cours auprès de la Cour pénale internationale (CPI).
La proposition de résolution «pour le renforcement des sanctions adoptées par le Conseil européen contre des responsables des violations des droits humains au Venezuela et pour soutenir les États signataires de l'enquête auprès de la Cour pénale internationale», a été adoptée par 324 voix contre 15. Seuls les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et Écologiste (CRCE) à majorité communiste ont voté contre, à l'exception notable de la sénatrice écologiste Esther Benbassa.
En septembre 2018, le président colombien Ivan Duque et les dirigeants d'Argentine, du Canada, du Chili, du Paraguay et du Pérou, tous alignés sur la politique de Washington, avaient envoyé un courrier à la procureure de la CPI, demandant une enquête sur le président vénézuélien Nicolas Maduro et ses collaborateurs pour «crimes contre l'humanité».
Dans un discours sans nuance, Olivier Cadic a longuement décrit une situation catastrophique. Depuis 2014, «14 471 personnes ont été arrêtées pour des motifs politiques», selon lui, ajoutant que «la violence est devenue une politique d'État» au Venezuela. Il cite également le chiffre qui avait été avancé par le journal Le Monde de 18 000 exécutions extrajudiciaires depuis 2016, selon l'ONU. Une information, sujette à des interrogations, que nous avions analysée dans un précédent article.
Au nom du CRCE, Pierre Laurent a déploré que la proposition de résolution «se contente d'alimenter un portrait caricatural d'une situation particulièrement complexe».
Pour Romain Migus, sociologue et journaliste indépendant ayant vécu de nombreuses années au Venezuela, le plaidoyer du sénateur Olivier Cadic est fondé «sur toute une série de mensonges qui dévoilent surtout sa méconnaissance du sujet». Ce spécialiste du Venezuela note également que le sénateur n'a pas prononcé un mot sur les sanctions économiques que subit le pays de la part des Etats-Unis ni sur «l’offensive paramilitaire qui vient de Colombie».
Dans son discours, Olivier Cadic prend fait et cause pour Juan Guaido, autoproclamé président du Venezuela en janvier et reconnu comme tel par les Etats-Unis, l'UE et leurs alliés. Pour Romain Migus, en votant cette résolution, «le Sénat français s'aligne sur la voie des putschistes» et la France, par voie de conséquence, fait preuve de «suivisme» de la politique étrangère états-unienne.
Meriem Laribi