Le 30 juillet, le Premier ministre Edouard Philippe a fait une déclaration dans la cour de Matignon, au côté du ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, mutique, pour affirmer la «volonté de transparence totale» des autorités, qui ont rendu public un compte-rendu tiré du rapport de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) concernant l'opération de police après laquelle a disparu Steve Maia Caniço dans la nuit du 21 juin à Nantes. Son corps avait été retrouvé le matin qui a précédé l'annonce du chef du gouvernement.
Mais loin d'apaiser les tensions, les déclarations des autorités, qui assurent qu'il n'y aurait pas de lien entre la noyade du jeune animateur scolaire et l'intervention de la police, ont suscité inquiétudes et vives interrogations de la part de l'avocate de la famille de Steve Maia Caniço, du maire de Nantes et des journaux français.
Le 30 juillet, l'avocate Cécile de Oliveira, qui représente la famille du jeune disparu, a fait part de son étonnement auprès de l'AFP à la suite de la prise de parole d'Edouard Philippe, évoquant une «affaire d'Etat» : «Je suis tout à fait étonnée que le Premier ministre ait pris la parole aujourd'hui. On annonçait plutôt une prise de parole du ministre de l'Intérieur pour qu'il donne connaissance des conclusions du rapport de l'IGPN [Inspection générale de la police nationale]. Le Premier ministre lui-même prend la parole, clairement, l'affaire devient une affaire d'Etat. Clairement, cette prise en main par l'exécutif d'une affaire qui est confiée à un juge d'instruction me paraît être révélateur d'un moment politique très compliqué sur les interventions policières.»
L'avocate explique également que la conclusion du rapport de l'IGPN est «difficile à entendre» pour les proches du jeune homme décédé à 24 ans, dans la mesure où ce document n'établit pas de «lien entre l'intervention des forces de police et [sa] disparition».
Tandis que le parquet nantais a ouvert une information judiciaire contre X pour «homicide involontaire», l'avocate de la famille de Steve Maia Caniço précise encore : «Il n'y a pas, à ce stade, à écarter une quelconque responsabilité de qui que ce soit. Il y a à continuer à enquêter, à instruire dans des conditions sereines et indépendantes et secrètes, comme la justice peut le faire.»
La maire socialiste de Nantes, Johanna Rolland, a pour sa part déploré le 30 juillet : «Je constate qu'après cinq semaines d'enquête, l'IGPN n'est toujours pas en mesure de dire ce qui s'est passé dans la nuit du 21 au 22 juin dernier sur le quai Wilson à Nantes. C'est pour le moins troublant et inquiétant. [...] Comme depuis les premiers jours, je demande la vérité, la transparence doit être totale. Nul ne peut transiger sur la transparence quand il s'agit de la mort d'un homme.»
Les journaux du 31 juillet semblent presque unanimes sur le sentiment de flou qui domine après la publication du compte-rendu par l'IGPN : Libération annonce «Un mort et des zones d'ombres», L'Humanité réclame «justice» et «vérité» pour Steve Maia Caniço. Dans La Charente libre, il est écrit : «Il en faudra beaucoup pour nous convaincre que la charge de la police, au petit matin sur les quais de Nantes, n’a pas de lien établi avec la noyade du jeune animateur.» Tandis que Le Midi libre s'inquiète de «l'impartialité du rapport de l'IGPN» et de «la lenteur de recherches», le corps du jeune animateur scolaire ayant été retrouvé plus d'un mois après sa disparition.
Et La République des Pyrénées de mettre également en doute l'impartialité de l'IGPN en soulignant qu'elle «a déjà été saisie 612 fois l’année passée pour des cas de violence délibérée de la part d’agents de police alors que les plaignants n’ont jamais obtenu gain de cause.»
La Montagne, plus lyrique, évoque «les eaux troubles de la Loire [...] aussi troubles que les circonstances sur lesquelles il faudra projeter la plus crue des lumières, aussi embarrassante soit cette affaire.» Le Républicain Lorrain fait quant à lui un bond dans l'histoire, en revenant sur la mort de Malik Oussekine «tombé sous les coups de la police en 1986» en marge d'une manifestation contre le projet de réforme universitaire Devaquet, à laquelle il ne participait pas. Et de lâcher, sans concessions : «Une chose est sûre à jamais : Steve et Malik étaient deux jeunes gens qui devaient vivre. Trente-trois ans ont passé, et rien n’a vraiment changé.»