Deux ans jour pour jour avant l'opération policière du 21 juin 2019 sur le quai Wilson à Nantes, à la suite de laquelle plus d'une dizaine de personnes ont atterri dans la Loire, et depuis laquelle le jeune Steve Maia Caniço est porté disparu, une intervention similaire se déroulait sur le même quai, dans des conditions semblables, mais n'aboutissait pas aux mêmes choix...
La préfecture, comme la mairie, était parfaitement informée des risques encourus par ces jeunes en cas d’intervention policière
Le 28 juillet, Mediapart explique avoir consulté le compte-rendu de l'intervention du 21 juin 2017, lors de laquelle les forces de l'ordre avaient alors opté pour «un repli tactique», décidant de se mettre «à distance des jeunes, sans faire usage de la force». «Compte tenu des risques que représente cette zone le long des berges non sécurisées, les policiers [étaient restés] à distance», ajoute en effet le site d'investigation selon lequel «la préfecture, comme la mairie, était parfaitement informée des risques encourus par ces jeunes en cas d’intervention policière».
On y est allé et on a joué avec le feu. Ce drame aurait pu être évité
De fait, plusieurs policiers ayant travaillé à Nantes cités par Mediapart connaissaient visiblement l’existence du rapport datant de 2017. «Les problèmes sur le quai Wilson étaient déjà connus depuis 2017. Et malgré cela, on a de nouveau ordonné une intervention sur un lieu qui n’avait toujours pas été sécurisé. Les jeunes pouvaient tomber à l’eau, mais on y est allé et on a joué avec le feu. Ce drame aurait pu être évité. Et les responsabilités côté police, préfecture et mairie doivent être assumées», confie l'un d'entre eux.
Cette année, il ne fallait pas intervenir
«Notre but est de protéger les jeunes, pas de les mettre en danger» explique un autre. Ayant lui-même participé à des opérations dans le cadre des fêtes de la musique, il regrette de son côté le choix d'intervention du 21 juin 2019 : «Cette année, il ne fallait pas intervenir ou alors il fallait leur trouver un autre lieu de fête.» Faisant référence au compte rendu de l'opération de juin 2017, le même agent pointe alors l'évolution des pratiques policières comme pouvant expliquer la différence d'appréciation de la situation entre les deux interventions. «Il faut remettre cela aussi dans un contexte plus général de durcissement des opérations de police. La hiérarchie n’y est évidemment pas étrangère et les pressions peuvent être fortes», estime-t-il.
Près d'un mois après la disparition de Steve Caniço, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a assuré que l'enquête de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale) serait prochainement rendue publique, celle-ci ayant été ouverte après l'opération policière controversée.