France

Gestion «maladroite» à 22 000 euros ? Six mois de prison avec sursis requis contre un député LREM

Le tribunal correctionnel de Rennes a requis six mois de prison avec sursis et cinq ans d'inéligibilité contre Mustapha Laabid, député LREM, pour abus de confiance. En cause : une ardoise de 22 000 euros laissée à l'association qu'il dirigeait.

Poursuivi pour abus de confiance, le député La République en marche (LREM) d'Ille-et-Vilaine, Mustapha Laabid, a reconnu le 3 juin devant le tribunal correctionnel de Rennes une gestion «maladroite et approximative» des fonds de l'association qu'il présidait, tout en récusant toute volonté d'enrichissement personnel. Le parquet a requis six mois de prison avec sursis et cinq ans d'inéligibilité.

Agé de 50 ans, Mustapha Laabid est soupçonné d'avoir utilisé à des fins personnelles des fonds du collectif Intermède, association d'insertion professionnelle dans les quartiers défavorisés, financée uniquement par subventions publiques, qu'il présidait jusqu'à son élection en 2017. Une enquête avait été ouverte à la suite d'un signalement, en octobre 2017, de Tracfin, la cellule antiblanchiment de Bercy.

Je suis profondément honnête

Le montant du préjudice présumé est de 21 930 euros, entre 2015 et 2017. Parmi les dépenses personnelles qui auraient été effectuées par Mustapha Laabid : 15 000 euros de repas, mais aussi des achats dans des commerces, des frais de téléphonie et d'hôtels.

Les larmes aux yeux, il admet avoir réglé des frais d'hôtel à Marrakech avec la carte de l'association

Autant de dépenses «dont le lien avec l'association est incertain», selon la présidente du tribunal, Véronique Lanneau. Enumérant les courses réalisées avec la carte de l'association – lait Ribot, gel douche, couches culottes, yaourts à boire, jouets pour enfants, etc – la magistrate a estimé qu'elles relevaient davantage de «courses familiales» que de dépenses pour une association d'aide à l'insertion professionnelle.

«Je n'ai jamais fait de courses personnelles sur le compte de l'association», s'est d'abord défendu Mustapha Laabid, assurant que chaque dépense était liée à un événement de l'association, avant de reconnaître qu'il avait pu y avoir des «négligences dans la gestion», citant notamment l'achat d'articles de sport. S'il a reconnu avoir réglé avec la carte de l'association des frais d'hôtel à Marrakech, où il passait des vacances en famille, il a assuré que c'était parce que sa carte personnelle «ne passait pas», ajoutant avoir ensuite remboursé l'association. 

«Je suis profondément honnête», a déclaré le député, larmes aux yeux, reconnaissant qu'il aurait dû faire appel à un expert-comptable. Le procureur a souligné que ces «manquements réitérés» ne pouvaient être uniquement considérés comme des erreurs mais bien comme des détournements volontaires. L'avocat du prévenu, William Pineau, a lui dénoncé une «enquête à charge», soulignant que Mustapha Laabid avait permis le retour vers l'emploi de plus de 8 000 jeunes. Il a également pointé la concomitance du signalement de Tracfin et de l'élection de Mustapha Laabid, tout en reconnaissant des «négligences simples et un manque de rigueur». Le tribunal rendra sa décision le 6 août.

Le parlementaire n'est pas un inconnu du grand public : quelques mois après son élection, il avait suscité la polémique en relayant des photos de tags hostiles à la police et à la mairie de Rennes. «Nique ta maire» pouvait-on par exemple lire sur l'une d'entre elle.

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