Dans son rapport annuel d'activité 2018, rendu public le 12 mars, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, est revenu entre autres sur son appel à bannir le désormais controversé lanceur de balles de défense (LBD) dans les opérations de maintien de l'ordre.
«La dangerosité de ces armes "non létales" a été soulignée au regard des blessures graves, mutilations, infirmités, voire des décès qu'elles occasionnent», écrit-il notamment dans un passage du texte cité par France Info. Jacques Toubon préconise de nouveau l'interdiction de cette arme dans le maintien de l’ordre.
Les grenades de type GLI-F4, elles aussi au cœur du débat sur l'armement des forces de l'ordre, sont, quant à elles, décrites par Jacques Toubon comme faisant partie des «plus dangereuses de l’arsenal de nos forces de sécurité». Le Défenseur des droits ajoute qu'elles «présentent des risques disproportionnés dans la gestion des manifestations». Ces armes comportent en effet une charge de TNT, un puissant explosif, dans leur composition. L'arme est accusée d'avoir mutilé plusieurs personnes, comme récemment lors de rassemblements des Gilets jaunes.
Jacques Toubon juge donc l'utilisation de cette grenade «inadaptée», et préconise une «décision de retrait de la dotation des forces de l’ordre», avant de voir intervenir «une nouvelle actualité dramatique».
L'ancien garde des Sceaux s'inquiète par ailleurs du «nombre important d'interpellations» effectuées lors des opérations de maintien de l'ordre. Il pointe du doigt un «déficit de dialogue et de concertation dans la gestion de l'ordre public».
Un maintien de l'ordre qui «mérite d'être adapté»
Le Défenseur des droits, qui ne s'appuie pas uniquement dans son rapport sur l'expérience récente de la crise des Gilets jaunes, mais aussi sur d'autres plus anciennes comme l'évacuation de Notre-Dame-des-Landes ou celle de camps de migrants, s'est défendu devant les journalistes de toute «prise de position» dans ses constats.
«Ce sont en réalité des constats que nous faisons à partir de réclamations que nous recevons et d'autre part des leçons que nous en tirons», a-t-il précisé le 12 mars lors de la conférence de presse marquant la remise de son rapport annuel d'activité.
«Le Défenseur des droits, depuis plusieurs années, dit que notre maintien de l'ordre, nos méthodes, nos moyens, nos règles mériteraient d'être adaptées», a-t-il ajouté. Jacques Toubon a précisé avoir transmis ces préconisations à François de Rugy, alors président de l'Assemblée nationale, en janvier 2018, soit plusieurs mois avant le début de la mobilisation des Gilets jaunes.
Christophe Castaner réplique
Depuis Vélizy-Villacoublay où il était en visite, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a accusé le Défenseur des droits de mener un «combat manifestement plus personnel que collectif». Le ministre reproche en effet à Jacques Toubon d'axer ses critiques sur les défaillances du maintien de l'ordre dans ses apparitions publiques, au détriment des autres sujets sur lesquels il travaille.
«Sur les 95 800 saisines en 2018 du Défenseur des droits, seul 1,5% concerne la déontologie de la police et seuls 10% de ces 1,5% concernent des faits qui seraient des fautes», a détaillé le ministre. «Il a fait le choix de parler de ce sujet et seulement de ce sujet-là, et je le regrette», a reproché le ministre de l'Intérieur.
Quant à la question de l'interdiction du LBD pour le maintien de l'ordre, elle ne semble pas non plus à l'ordre du jour. «Il faut se poser la question simple : est-ce que nos forces de l'ordre ont le droit de se défendre face à l'hyperviolence de quelques-uns ?», a demandé le ministre, campant ainsi sur ses positions.
Le 7 mars, le secrétaire d'Etat à l'Intérieur Laurent Nunez a précisé que plus de 13 000 tirs de LBD avaient été effectués depuis le début du mouvement des Gilets jaunes. De nombreux blessés sont à déplorer depuis le début du mouvement, notamment du côté des manifestants, dont certains ont été gravement blessés voire mutilés.
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