France

Macron va-t-il faire un nouveau cadeau aux chasseurs en prolongeant la chasse aux oies cendrées ?

Le gouvernement a soumis en consultation publique un projet d’arrêté autorisant la prolongation d’un mois la chasse aux oies cendrées. Yves Vérilhac, directeur de la Ligue protectrice des oiseaux, fustige un «électoralisme de bas étage».

Le ministère de l'environnement a soumis à l’avis des citoyens un projet d'arrêté pour prolonger d'un mois la chasse à l'oiseau migrateur qu'est l'oie cendrée. Pour Yves Vérilhac, directeur général de la ligue de protection des oiseaux, (LPO), interviewé par RT France, ce potentiel nouveau cadeau du président de la République aux chasseurs est écœurant. «Ce n'est pas possible que Macron fasse des cadeaux aux chasseurs !», s'exclame-t-il. «On comprend la démission de Nicolas Hulot !», ajoute l'intéressé.

Le projet d'arrêté s'appuie sur la constatation que «la population européenne des oies cendrée est en forte expansion» depuis ces dernières années, avec une population de 1 200 000 spécimens. «Depuis quinze ans, les gouvernements, soumis aux pressions des chasseurs, ont tenté de prolonger cette chasse. Mais Emmanuel Macron, dans la perspective des européennes, a fait plus fort. Il a carrément promis lors d'une réunion que l'oie des moissons et l'oie rieuse pourront être chassées jusqu’au 1er février et l'oie cendrée jusqu’au 28. Le président de la fédération des chasseurs s’en est vanté dans la presse», s'indigne Yves Vérilhac.

Pour lui, cette démarche n'est que de «l’électoralisme de bas étage» et la prolongation de la durée officielle de la chasse serait néfaste aux oiseaux. «Les chasseurs vont déranger les espèces, tirer ce qui n'a pas le droit d'être chassé. La France est le pays qui a le plus d'espèces chassables, dont 64 espèces d'oiseaux chassées dont 20 sont en danger, et sur la plus longue période. Ça suffit !», se désole-t-il.

En France pourtant, la chasse aux oiseaux migrateurs s'arrête lorsqu'ils s'envolent pour leur lieu de nidification, soit la 3e décade de janvier, correspondant en France au 31. De plus, les oiseaux migrent de plus en plus tôt à cause du réchauffement climatique. Cette démarche, qui va à l'encontre des bonnes pratiques, s'expliquerait par des raisons pécuniaires, selon le directeur de la LPO.

La France est malade du lobby de la chasse

«Les chasseurs, les élus et ceux qui tiennent l’économie de la chasse se battent comme des chiens pour cela. C'est une question de sous. La location d'une hutte pour chasser les oies coûte 1 000 euro la nuit, vous imaginez...», explique-t-il.

«Pour arriver à leur fin, les chasseurs ont dit que les oies rieuses et oies des moissons ne commençaient pas leur migration la date de l'arrêt de la chasse. Et secundo, ils ont argué que les oies faisaient des dégâts aux cultures dans d'autres pays. C'est le cas aux Pays Bas, mais ce ne sont pas les mêmes oies. Les nôtres remontent jusqu'en Scandivnie. Ils disent alors qu'il faut "aider la Norvège" mais la Norvège ne nous a rien demandé !», tempête le directeur de la LPO.

Le gouvernement n'avait pas tenu compte d'une précédente consultation sur la chasse

«La France est malade du lobby de la chasse. Le groupe chasse est très important à l'Assemblée. Quand on voit que Boris Vallaud, le porte-parole du Parti socialiste (PS), alors qu'il est jeune, se bat pour qu'on fasse des brochettes de pinsons, maintenant qu'on a réussi à protéger les ortolans !», récrimine Yves Vérilhac.

La consultation ne revêt aucun caractère contraignant. Celle qui demandait l'avis des Français sur la chasse des oiseaux à la glu en juillet 2018 a recueilli 88% d'avis négatifs. Pourtant, François de Rugy, le ministre de la Transition écologique, a bien signé l’autorisation de cette chasse non spécifique, qui tue 50 000 volatiles par an et qui piège un grand nombre d'oiseaux protégés.

Si un arrêté pour prolonger la chasse aux oies cendrées est signé, Yves Vérilhac annonce que la LPO attaquera au Conseil d'Etat. Jusqu'ici, pour ce même sujet, son association a toujours obtenu gain de cause. Ce qui ne semble pas infléchir la volonté de l'exécutif. «Pour commencer, on ne tire pas sur les oiseaux migrateurs. Et si l'on gagne au Conseil d'Etat, ça rendra les chasseurs fous furieux. Ce projet signe un manque de courage politique, une faiblesse par rapport aux lobbies, comme avec celui des pesticides», se désole le directeur de la LPO.

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