Pour justifier l'interpellation et la garde à vue du Gilets jaune Eric Drouet le soir du 2 janvier, lors d'un rassemblement visant à rendre hommage aux morts et aux blessés au cours de la mobilisation, les autorités ont fait valoir «l'organisation d'une manifestation sans déclaration préalable».
Cette justification est loin d'avoir convaincu sur les réseaux sociaux, nombre d'internautes la tournant en dérision, employant le hasthag #DeclareTaManif. «Il y a un groupe de vieux qui font de la pétanque dans le village [...] Ils sont sept. On déclare ou pas ?», s'interroge par exemple l'un d'eux sur un ton résolument ironique.
Un autre renchérit, racontant avoir stoppé immédiatement son voisin «séditieux», qui comptait aller faire des courses sans en avoir informé les autorités.
«Réunion autour de notre candidate aux européennes ce soir. Attention, on risque d'être une vingtaine de dangereux gauchistes !», lance encore un internaute.
«Je vais déjeuner place des fêtes. On est quatre», fait savoir un utilisateur de Twitter, soucieux de ne pas contrevenir aux règles.
Une dernière interpelle directement le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, pour lui faire part de son programme : «Je voudrais pas finir en garde à vue, alors que je veux juste refaire le monde autour d'un Bourgueil et d'un camembert.»
Amnesty : «L'absence de notification aux autorités de la tenue d'une manifestation ne rend pas celle-ci illégale»
Comme le rappelait Amnesty International en mai dernier, dans une publication reprise ce 3 janvier par des responsables de La France insoumise (LFI) notamment, le droit de manifester est garanti par la Déclaration universelle des droits de l’Homme dans son article 20 : «Toute personne a droit à la liberté de réunion et d'association pacifiques.» Ce droit est compété en France par un système de déclaration préalable, visant à en faciliter l’exercice en permettant aux autorités de prendre des mesures pour garantir l’ordre public.
Toutefois, d'une manière générale, «l'absence de notification aux autorités de la tenue d'une manifestation ne rend pas celle-ci illégale et, par conséquent, ne doit pas être utilisée comme motif de dispersion de la manifestation», souligne Amnesty International. L'ONG insiste sur le fait que les organisateurs qui ne notifient pas la tenue d'une manifestation «ne doivent pas être soumis à des sanctions pénales ou administratives se soldant par des amendes ou des peines d'emprisonnement». Ce qui n'empêche pas Amnesty de préciser qu'en France, «les organisateurs peuvent être poursuivis sur cette base».