La Cour de cassation a annulé ce 12 décembre la condamnation de Cédric Herrou et d'un autre militant, tous deux ayant été condamnés en appel pour avoir porté assistance à des migrants, une première depuis la consécration du principe de fraternité dans la loi française.
La plus haute juridiction de l'ordre judiciaire a renvoyé les deux militants devant la cour d'appel de Lyon pour qu'ils y soient à nouveau jugés. «C'est une grande victoire», s'est félicité leur avocat Patrice Spinosi, saluant la reconnaissance d'une «exception humanitaire qui doit conduire à la relaxe» des deux hommes.
L'agriculteur Cédric Herrou, devenu une figure de l'aide aux migrants, avait été condamné en août 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence à quatre mois de prison avec sursis pour avoir «facilité la circulation et le séjour» de migrants, ainsi que pour les avoir aidés à franchir la frontière franco-italienne.
La même cour avait condamné en septembre 2017 le chercheur Pierre-Alain Mannoni à deux mois de prison avec sursis pour avoir aidé et transporté trois migrantes érythréennes. La cour d'appel l'avait reconnu coupable d'avoir «facilité la circulation et le séjour» des migrantes. La cour d'appel d'Aix avait estimé que le militantisme désintéressé des deux hommes ne suffisait pas à leur faire bénéficier de l'immunité pénale prévue dans certaines circonstances par la loi.
Le «principe de fraternité» consacré par la Cour de cassation
Convaincus du contraire, ils avaient déposé un recours devant le Conseil constitutionnel et obtenu des Sages, le 6 juillet, la consécration du «principe de fraternité» duquel découle «la liberté d'aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national». Concrètement, le Conseil constitutionnel a décidé de sortir du champ des poursuites possibles toute aide humanitaire au «séjour» comme à la «circulation» des migrants. En revanche, «l'aide à l'entrée irrégulière» reste illégale.
Selon l'article de la loi asile-immigration du 10 septembre 2018 – modifié suite à cette décision – l'aide à la circulation ou au séjour irrégulier d'un étranger ne peut pas entraîner de poursuites pénales lorsqu'elle «n'a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et a consisté à fournir des conseils ou accompagnements juridiques, linguistiques ou sociaux, ou toute autre aide apportée dans un but exclusivement humanitaire.»
C'est sur cette nouvelle loi que s'est appuyée la Cour de cassation pour annuler les condamnations des deux hommes. Et, alors que l'avocat général avait préconisé une cassation partielle, excluant l'«aide à l'entrée irrégulière» qui concernait le seul Cédric Herrou, la Cour a choisi de «tout remettre à plat», s'est réjoui Patrice Spinosi.
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