France

La Russie derrière un gonflage sur les réseaux de la mobilisation des Gilets jaunes ?

Si l'ampleur de la mobilisation des Gilets jaunes est telle qu'elle a concentré l'attention de la presse, une société de cybersécurité voit derrière ce mouvement spontané... des comptes «liés à la Russie». La France se penche sur la question.

Le 8 décembre, le monde entier avait les yeux rivés sur l'Hexagone – et en particulier sa capitale – où se déroulait l'acte 4 de la mobilisation nationale des Gilets jaunes. Pour le quatrième samedi consécutif, des milliers de Français ont battu le pavé. Le dernier décompte du gouvernement fait état de 136 000 personnes, de 2 000 interpellations et de 1 700 gardes à vue étant donnés les incidents violents ont émaillé l'événement

Les images des affrontements entre les manifestants et les forces de l'ordre ayant fait le tour du monde, via notamment les réseaux sociaux, le phénomène des Gilets jaunes a-t-il vraiment eu besoin d'un coup de pouce supplémentaire pour accroître sa notoriété ? 

C'est la question que soulève le journal britannique The Times, qui dans son article paru le 8 décembre au matin a relayé une analyse, publiée par la société de cybersécurité New Knowledge, qui suggère que la Russie serait liée à un gonflage du traitement de la mobilisation des Gilets jaunes sur les réseaux sociaux.

Selon The Times, qui cite les analyses de New Knowledge, quelque 200 comptes Twitter «liés à la Russie» auraientdiffusé des photos et des vidéos de personnes grièvement blessées par la police. Le journal britannique souligne d'ailleurs que ces comptes auraient diffusé des images qui proviendraient d'événements tout à fait extérieurs aux manifestations qui se déroulent en France depuis plusieurs semaines. Et, si le concept de comptes Twitter «liés à la Russie» reste flou, New Knowledge croit savoir que ceux-ci ont «cherché à amplifier les manifestations de rue qui ont secoué la France».

L'accusation a été prise au sérieux par l'exécutif français : sous la supervision du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), un organisme qui dépend du Premier ministre, les autorités françaises ont ainsi décidé d'enquêter sur une possible ingérence étrangère dans l’activité des réseaux sociaux, selon Le Parisien.

L'analyse de New Knowledge a également été rapidement partagée sur les réseaux sociaux, notamment, en France, par l'essayiste Caroline Fourest et le directeur général de la Fondation pour l'innovation politique, un think-tank libéral, Dominique Reynié.

Pour autant, Paris reste prudent face aux allégations de New Knowledge. «Aucun élément objectif» ne permet d’établir un lien technique entre l’effervescence sur les réseaux sociaux et les services russes a en effet confié une source proche du dossier au Parisien, qui précise que la justice n’a pas été saisie.

L'apparition de telles accusations antirusses, au cœur d'une actualité délicate pour les autorités françaises, n'est pas sans rappeler les allégations qui avaient été portées contre Moscou cet été, au sujet de l'affaire Benalla. EU Disinfo Lab, une ONG pro-UE, avait attribué l'ampleur prise par la polémique concernant l'ex-conseiller de l'Elysée sur les réseaux sociaux, à une influence de la twittosphère «russophile». Or, cette thèse avait été vivement dénoncées par le site Les Crises d'Olivier Berruyer, qui avait notamment mis en lumière les faiblesses méthodologiques de l'enquête de UE Disinfo Lab. L'ONG avait elle-même corrigé son analyse, en publiant dès le 8 août de nouvelles conclusions de son étude, ne faisant plus état d'une quelconque influence russe.

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