France

Emmanuel Macron, un agnostique à la conquête de l'électorat catholique ?

Si Emmanuel Macron se défend d'être agnostique, il multiplie les gestes de proximité avec l'Eglise catholique. En juin, il se rendra d'ailleurs au Vatican pour rencontrer le pape François. Une visite qui est loin d'être anodine.

Emmanuel Macron n'est-il pas en train de lancer une opération séduction à destination de l'électorat catholique conservateur ? Depuis plusieurs mois, le président de la République ne cesse d'envoyer des signaux chaleureux en direction de l'Eglise catholique, quitte à flatter le clergé le plus traditionaliste. Une inclination qui n'est d'ailleurs pas nouvelle chez lui.

Le 4 mai, le Vatican a annoncé qu'Emmanuel Macron serait reçu fin juin par le pape François. Si les deux chefs d'Etat ne se sont encore jamais rencontrés officiellement, le pape François avait félicité Emmanuel Macron pour son élection, voici un an, en évoquant la «tradition chrétienne» de la France qui était selon lui appelée à défendre «une société plus juste». Une visite certainement symbolique sur le plan diplomatique mais qui incarne bel et bien une continuité dans l'action d'Emmanuel Macron, qui multiplie les signes de rapprochement entre la France et l'Eglise catholique.

Ainsi, lors de la Conférence des évêques le 9 avril, à laquelle le président de la République était présent de manière inédite, il a prononcé un discours pour tenter de rassurer les catholiques sur son action politique, faisant part de sa volonté de «réparer» le lien entre l'Eglise et l'Etat, lien qui, selon lui, «s'est abîmé». Un lien entre Eglise et Etat qui était pourtant supposé être rompu par la loi de séparation des Eglises et de l'Etat de 1905.

En outre, le président Emmanuel Macron a reçu, à l'occasion d'un dîner le 13 février à l'Elysée, plusieurs personnalités dont il souhaitait recueillir le point de vue quant à l'épineuse question de l'euthanasie. De manière relativement inhabituelle, monseigneur Michel Aupetit ainsi que d'autres dignitaires religieux étaient présents. Ils ont été entendus trois heures durant par le chef de l'Etat.

En novembre, le président français avait également affirmé son intention de prendre possession du titre de premier et unique chanoine d'honneur de Saint-Jean-de-Latran, la cathédrale du pape à Rome, une tradition qui remonte à Henri IV. 

Par ailleurs, en septembre 2016, alors qu'il envisageait sa candidature à la présidentielle, Emmanuel Macron avait rencontré autour d'un petit-déjeuner une douzaine de prêtres, dont deux opposés au mariage pour tous, le Père Pierre-Hervé Grosjean et l'abbé Pierre Amar, cofondateurs du blog Padreblog, «pour parler du fait religieux, de la laïcité». Ces derniers avaient notamment défilé dans Paris lors de la Manif pour tous, contre le mariage homosexuel. Un choix, en termes de communication, qu'Emmanuel Macron avait alors pris le risque d'assumer.

Entre plaire à la branche catholique conservatrice et promouvoir la prochaine loi bioéthique prévue au Parlement pour l'automne, qui débattra de la GPA ou d'une extension de la PMA pour les couples homosexuels, Emmanuel Macron semble naviguer entre deux eaux.

Peu surprenant quand on se penche sur les pérégrinations spirituelles du chef de l'Etat. En effet, si Emmanuel Macron se dit aujourd’hui «redevenu» agnostique, après avoir demandé à être baptisé à l'âge de 12 ans, il avoue tout de même être «réceptif à la présence de la transcendance dans nos vies». Une position qui semble là aussi ménager la chèvre et le chou.

Bastien Gouly

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