France

Evacuation surprise de la ZAD de Bure : 500 gendarmes ont délogé les occupants antinucléaires

Les quelques occupants de la ZAD du bois Lejuc à Bure protestent depuis deux ans contre l’installation d’un site d'enfouissement de déchets nucléaires. Ils ont été expulsés par un escadron de 500 gendarmes au petit matin le 22 février.

Le gouvernement ne veut pas d’un Notre Dame-des-Landes bis. A 6h25 a été donné le coup d’envoi de l'expulsion de la ZAD protestant contre le projet de site d’enfouissement de déchets nucléaires Cigéo dans le bois Lejuc de Bure (Meuse). Une opération qui aura été difficile à réaliser sur le site proche de Nantes mais qui signifie un retour à l'ordre pour le ministre de l'Intérieur. Pendant l'opération celui-ci a déclaré : «Nous ne voulons plus qu'il y ait en France des lieux de non-droit».

Gérard Collomb a notamment annoncé sur Twitter la venue des gendarmes pour déloger les occupants antinucléaires. 500 membres de forces de l'ordre étaient présents pour évacuer moins d'une cinquantaine de personnes mobilisées contre ce site géré par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).

Cette opération a lieu à la suite d'une décision rendue le 26 avril 2017 par le tribunal de grande instance de Bar-le-Duc qui avait ordonné «l'expulsion sans délai» «de tout occupant des terrains appartenant à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra)».

Lors des opérations, au moins cinq militants ont été interpellés. Quelques personnes s'étaient retranchées dans des cabanes en bois perchées dans des arbres à 20 mètres de hauteur. 

Les gendarmes ont également délogé vers midi une trentaine de militants qui s'étaient barricadés dans une maison à proximité. 

Incrédulité des politiques opposés au projet

La rapidité et le caractère inattendu de l’opération sont d'autant plus étonnants que le secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, Sébastien Lecornu, avait prévu de se rendre sur place dans l’après midi du 22 février, un déplacement qui ne laissait nullement présager d'une éventuelle évacuation le matin même.

L’expulsion et le projet ont provoqué la colère de plusieurs responsables politiques, comme le député de la France Insoumise Eric Coquerel.

Benoit Hamon, ancien candidat PS à la présidentielle de 2017 a déclaré sur France Info : «C'est la méthode Gérard Collomb : on l'aurait écouté, il aurait fait la même chose à Notre-Dame-des-Landes. Fort heureusement, personne ne l'a écouté, donc il se rattrape sur Bure en quelque sorte».

Le parti Europe Ecologie - les Verts a protesté, estimant que «cette évacuation, probablement illégale», intervenait «après des mois de surveillance, de harcèlement, d'acharnement judiciaire infondé, de répression violente».

Les écologistes notent un paradoxe : l'illégalité invoquée pour déloger les zadistes est aussi du côté de l'Andra. «Où étaient les "forces de l'ordre" quand l'Andra faisait construire un mur autour d'un terrain qui ne lui appartenait pas ? Et quand l'Andra faisait ILLÉGALEMENT défricher le Bois Lejuc ?», a demandé EELV.

En effet, lorsque l'agence a défriché sept hectares de forêt en juin et juillet 2016 pour démarrer les travaux, elle n'a pas respecté les dates requises d'interdiction de défrichage de mars à juillet correspondant à la période de nidification des oiseaux. Elle a aussi édifié un mur de béton de 2 mètres de haut et de 3 kilomètres de long sans autorisation. Des associations et des militants ont donc assigné l'agence en référé et l'Andra a été condamnée le 1er août 2016 au TGI de Bar-le-Duc à cesser ses travaux et remettre les parcelles en état, un jugement confirmé en appel en mai 2017. EELV s'étonne donc que la police ne soit pas intervenue cette fois-là pour faire respecter la loi.

Un des anciens soutiens des opposants au site d'enfouissement de Bure est le ministre Nicolas Hulot, à l'époque président de sa fondation, ici en photo à Rennes il y a un an et demi.

Que contestent les occupants de ce bois ?

Au cœur du bois Lejuc devraient être réalisés différents destinés au stockage les déchets les plus radioactifs de France à 500 mètres sous terre. Le site pourrait accueillir 80 000 m3 de déchets dont 10 000 m3 hautement radioactif qui auraient une durée de vie de 100 000 ans. Ils seront vitrifiés puis refroidis à la Hague durant 40 à 50 ans puis scellés dans des cylindres de métal et conduits à Bure.

Après différentes études pour trouver un site, celui de Meuse-Haute-Marne a été choisi en 1998 pour l'implantation. Le chantier a commencé deux ans après par la construction d'un laboratoire souterrain d'analyse de roches en vue de l'enfouissement. En 2006, la solution de stockage retenue a été celle du «stockage réversible en couche géologique profonde». Les associations écologistes réfutent ce choix et Greenpeace France a parlé un «stockage réversible en subsurface».

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