Ils n'ont pas le droit de grève mais ont trouvé l'astuce pour se faire entendre : les fonctionnaires de la police aux frontières (PAF) affectés au contrôle de la frontière italienne dans les Alpes-Maritimes, se sont majoritairement mis en arrêt maladie pour protester contre leurs conditions de travail, selon des informations du syndicat Unité SGP-Police rapportées par l'AFP le 27 décembre.
11 policiers d'une brigade de la PAF à Menton s'étaient déjà fait porter pâles le 26 décembre. Désormais c'est la quasi-totalité des effectifs chargés de surveiller les postes frontières à Menton (au poste de Saint-Louis) et Breil-sur-Roya (au poste de Fanghetto) qui ont dû être remplacés.
Les deux postes frontières concernés sont des points d'entrée des demandeurs d'asile et étrangers en situation irrégulière qui cherchent à entrer en France depuis l'Italie.
Ni chauffage, ni eau, ni toilettes
Selon le syndicat Unité SGP-Police, les policiers sont «tout simplement fatigués et à bout», ne disposant à Fanghetto que d'un bâtiment précaire sans eau courante ni chauffage, malgré le froid de l'hiver dans cette vallée alpine.
La préfecture des Alpes-Maritimes a de son côté déclaré à l'AFP suivre «avec beaucoup d'attention la situation de la PAF à Menton et la question des conditions de travail des fonctionnaires de police».
On ne peut pas construire une maison là-bas. Ce qu’on leur propose, c'est un bus aménagé en centre de commandement
«Le travail demandé est exigeant et très fatigant, avec des conditions climatiques compliquées, mais on ne peut pas construire une maison là-bas. Ce qu’on leur propose, c'est un bus aménagé en centre de commandement [installé à Fanghetto]», commente un responsable de la PAF pour l'AFP.
Ni locaux, ni véhicules sécurisés, ni formation aux armes
Interrogé par Le Figaro, Jean-Luc Chaudron, délégué départemental en charge de la PAF au syndicat Unité-SGP police, estime que les mesures proposées par la direction pour Fanghetto constituent du «rafistolage». «Ce qu'on veut c'est un Algeco [construction modulaire] équipé avec du chauffage, des sanitaires et de l'eau, car il ne faut pas se leurrer, on va rester là des années». Il ajoute que, pour le moment, les fonctionnaires ne disposent pas de toilettes. «Pour les hommes, ça va, mais les femmes, elles font comment ?», questionne le syndicaliste. Ce dernier explique d'ailleurs avoir alerté depuis longtemps sa hiérarchie.
Autre difficulté : le matériel de sécurité. «On a les armes, mais seulement deux d'entre nous sur soixante-dix ont été formés à leur utilisation», critique Jean-Luc Chaudron. Il pointe également du doigt l'absence de véhicules sécurisés pour le transport des migrants.
La grogne dans la police, de manière générale, n'est pas nouvelle. En août, quatre compagnies de CRS avaient utilisé le même stratagème, en se mettant en arrêt maladie, pour exprimer leurs désaccords contre le projet gouvernemental de fiscalisation des indemnités journalières d’absence temporaire. Cette orientation ouvrait la voie à une baisse de leurs revenus compensatoires. Une mobilisation réussie puisque, un peu plus d'un mois plus tard en septembre, le ministère de l'Intérieur avait décidé de faire volte-face et d'entendre la revendication des CRS.
D'autres ne sont pas aussi chanceux. Toujours en août, l'Union des policiers nationaux indépendants (UPNI) avait organisé un concours de photographies pour dénoncer les conditions de travail des fonctionnaires de police dans les commissariats. De nombreux clichés montraient des rats, des cafards ou des urinoirs bouchés. Des insalubrités qui provoquent une démotivation croissante des agents, qui font preuve selon l'UPNI de «fatalisme».
Dernièrement, le nouveau siège de la police judiciaire, inauguré en octobre 2017, était déjà critiqué en décembre pour son système de chauffage. En effet, les policiers, interrogés par France 2, déclaraient que la température à l'intérieur des locaux, parfois, ne dépassait pas les 16 degrés, les policiers travaillant par conséquent en manteau ou apportant leur propre radiateur d'appoint.