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Le parquet de Paris requiert un procès contre Dieudonné pour fraude fiscale

Dieudonné est sous la menace d'un procès pour fraude fiscale, selon le réquisitoire rendu par le parquet de Paris au terme d'une enquête sur la gestion de son patrimoine. L'humoriste est suspecté d'avoir organisé son insolvabilité.

Les investigations sur la gestion du patrimoine de Dieudonné M'bala M'bala, déclenchées en 2013, ont mis à jour de fortes sommes en liquide manipulées pendant cinq ans, alors qu'il se disait à l'époque ruiné et insolvable.

Entre 2009 et 2014, l'humoriste controversé, qui ne remplissait plus de déclaration d'impôts, a néanmoins réalisé des transferts d'espèces à l'étranger pour un total de 569 353 euros, principalement au Cameroun mais aussi en Chine, à Hong Kong et aux Emirats arabes unis, selon une source proche du dossier. En janvier 2014, les enquêteurs avaient également découvert plus de 650 000 euros, toujours en espèce, dans les coffre-forts de sa propriété d'Eure-et-Loire, selon cette source. Dieudonné avait expliqué que cette somme provenait de la billetterie de sa tournée en France pour son spectacle «Le Mur», que les autorités tentaient alors d'interdire en raison de sketchs jugés antisémites.

Dans son réquisitoire, signé le 28 septembre et révélé par le site d'information Les Jours, le parquet a donc demandé le renvoi en correctionnelle de Dieudonné pour fraude fiscale, blanchiment de ce délit, ainsi que pour abus de biens sociaux au préjudice de sa société Les Productions de la Plume et pour avoir organisé sa propre insolvabilité.

Quant à sa compagne, Noémie Montagne, le ministère public réclame qu'elle soit jugée à ses côtés pour abus de biens sociaux et fraude fiscale. Cette enquête, ouverte début 2013 par le parquet de Chartres avant d'être confiée à un juge d'instruction à Paris un an plus tard, «a révélé l'existence de mouvements financiers particulièrement suspects, occultes et dissimulés», selon les réquisitions du parquet, dont a eu connaissance l'AFP.

L'affaire était partie d'un signalement en décembre 2012 de Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy, qui avait détecté une première série de transferts suspects de 414 000 euros entre 2009 et 2012 à destination de proches au Cameroun. Le fruit d'un héritage paternel, selon la défense de Dieudonné. Pourtant, au début de l'enquête, l'historique des comptes de l'humoriste «ne faisait ressortir aucun retrait d'espèces depuis janvier 2009», selon une source proche du dossier. 

Pas de «caisse enregistreuse»

Pour le parquet, les liquidités saisies en 2014 au domicile du couple provenaient «vraisemblablement» des recettes de spectacles réalisés et non déclarés. Les investigations ont établi que le théâtre de la Main d'Or à Paris, où Dieudonné se produisait depuis 15 ans et duquel la justice a ordonné son expulsion le 8 novembre, «était dépourvu de caisse enregistreuse comme de terminal de paiement bancaire», selon des témoignages versés à l'enquête.

Par la suite, une procédure antérieure, initiée par une plainte de la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme), avait été jointe au dossier. L'association avait obtenu la condamnation à plusieurs reprises de Dieudonné pour diffamation, provocation à la haine et à la discrimination raciale. Mais ce dernier ne réglait, jusqu'en 2014, ni ses amendes, ni les dommages et intérêts.

Pour le parquet, c'est afin de se soustraire à ces condamnations, que Dieudonné aurait «organisé» son insolvabilité «en dissimulant tout ou partie de ses revenus». «C'est la suite logique de l'instruction, la Licra est dans l'attente d'une ordonnance de renvoi des juges», s'est félicité l'avocat de l'association antiraciste, David-Olivier Kaminski.

Les avocats de Dieudonné n'étaient pas disponibles le 9 novembre pour réagir. La cour d'appel a par ailleurs confirmé le 8 novembre la condamnation à deux mois de prison avec sursis et 10 000 euros d'amende pour ses propos jugés antisémites dans son spectacle «La bête immonde».

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