Bernard de la Villardière est coutumier des sujets sensibles et son émission Dossier Tabou provoque régulièrement de vifs débats, notamment sur internet. Sa dernière enquête diffusée sur M6 le 1er octobre n'a pas fait exception : dédiée au harcèlement et au viol, elle a déclenché des réactions virulentes de la part de téléspectateurs divisés quant à l'interprétation du reportage et les éventuels liens avec l'islam qu'il sous-entend.
Pour les besoins de l'émission, les journalistes se sont livrés à une expérience de rue. Quatre jeunes femmes postées dans une rue de Lyon, chacune vêtue d’une manière particulière (T-shirt, débardeur...) et tenant une pancarte sur laquelle on peut lire : «Ma tenue justifie-t-elle que je me fasse agresser ?»
Invités à réagir, les passants ont parfois eu des réactions pour le moins surprenantes : «Y’a que des femmes comme vous qui se font violer», «Je l'agresserais bien», «C'est à cause de femmes comme ça qu'il y a des viols, regardez comment elle est habillée»...
Rapidement, de nombreuses personnes s'émeuvent sur Twitter de ce qu'elles voient et associent la séquence à une question féministe.
Un grand nombre de réactions identifient la source du problème dans un rapport des hommes aux femmes qui serait empreint de machisme et de violence.
Les «mecs» sont largement pointés du doigt.
Parfois, c'est plus largement «la jeune génération» qui est évoquée.
Les réflexions de ces passants ont conduit de nombreux internautes à pointer du doigt le manque d'éducation des jeunes hommes.
Cette analyse semble également partagée par Marlène Schiappa, secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, interrogée par Bernard de la Villardière dans le cadre de ce Dossier Tabou. Au moment de la diffusion de l'émission, cette dernière a d'ailleurs rappelé sur Twitter qu'elle mettrait en place «une campagne forte à destination des hommes».
L'immigration et l'islam, facteurs explicatifs ?
Néanmoins, plusieurs autres téléspectateurs estiment que les remarques sexistes, violentes ou insultantes des passants filmés par l'équipe de Dossier Tabou ne posent pas tant la question du rapport des hommes aux femmes que celle de l'immigration et de l'islam. Comme le note Le Figaro, la plupart des hommes s'adressant en ces termes aux jeunes Lyonnaises dans la séquence sont en effet «d’origine nord-africaine».
D'autre part, certaines remarques filmées par les journalistes ne semblent pas laisser de doute quant à leur caractère religieux.
Ces images n'ont pas manqué de faire réagir.
Pour de nombreux internautes, le harcèlement mis en lumière par l'émission serait moins un problème lié aux hommes en général qu'à l'immigration et à un «endoctrinement».
Dans cette mesure, l'intervention de Marlène Schiappa apparaît à certains comme relativement préoccupante, car ne prenant pas en compte ce qu'ils estiment être la dimension religieuse du problème.
Une controverse qui devient politique
La multiplication des réactions sur Twitter a rapidement conduit plusieurs responsables politiques à réagir, la majeure partie d'entre eux issus des rangs du Front national (FN). Tel est par exemple le cas de Philippe Vardon, qui a mis en cause l'immigration de manière explicite.
Florian Philippot a également réagi à la diffusion de Dossier Tabou. Sans mettre directement en cause l'islam et l'immigration, le président du mouvement Les Patriotes, nouvellement créé depuis son départ du FN, évoque «la France [et] nos valeurs».
Constatant que le débat commençait à prendre de l'ampleur, plusieurs personnes ont alors dénoncé le biais des journalistes de l'émission diffusées par M6. Pour la journaliste Sihame Assbague, l'émission aurait donc volontairement «ciblé l'islam, les mecs de quartier, le rap».
D'autres journalistes ont également reproché à l'émission de Bernard de la Villardière de ressasser des thèmes qui lui seraient chers.
De son côté, l'intéressé se dit tout à fait conscient des accusations d'islamophobie qui le guettent. «Des tas de gens, et notamment les journaux, vont trouver que je fais de l’islamophobie, je m’y prépare», assure-t-il au Figaro. «Peu leur importe si ce que je dis est vrai ou faux, mais je fais mon travail de journaliste», assure-t-il.
En effet, ce n'est pas la première fois que Bernard de la Villardière suscite une polémique en raison de séquences jugées racistes ou islamophobes. En mai dernier, c'était une émission consacrée aux Africains de Paris qui avait ému les réseaux sociaux. En septembre 2016, c'était une émission consacrée à l'islam qui avait déclenché d'innombrables réactions, certains y voyant une enquête journalistique osant briser les tabous, d'autres dénonçant un sensationnalisme flirtant avec l'islamophobie.