France

Omission de l'Hyper Cacher dans une tribune de Français musulmans : choix réfléchi ou faux procès ?

Un certain nombre d'associations et de politiques ont manifesté leur indignation après la publication d'une tribune par une quarantaine de musulmans, dans laquelle sont listées les victimes des récentes attaques djihadistes à l'exception des juifs.

L'initiative, qui se voulait porteuse d'un message de cohésion nationale, sera parvenue à susciter de nombreuses réactions de colère.

Dans une tribune publiée le samedi 31 juillet dans le JDD, 42 personnalités musulmanes, parmi lesquelles la sénatrice PS Bariza Khiara et le philosophe Abdennour Bidar, appellent à une nouvelle organisation de l'islam en France, face à la vague de radicalisation actuelle. Or, un passage de cet appel, intitulé «Nous, Français et musulmans, sommes prêts à assumer nos responsabilités», n'a pas été du goût de tout le monde : dans leur énumération des victimes des récentes attaques djihadistes en France, les intellectuels musulmans ne citent pas les victimes juives de Mohamed Merah à Toulouse et Montauban en 2012, ni celles du magasin Hyper Cacher en janvier 2015.

Indigné, le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) a fait savoir dans un communiqué son «inquiétude [concernant cet] oubli lourd de sens», qui constitue pour lui «un affront à la mémoire des huit victimes de ces deux attentats, qui ont été ciblées par le terrorisme parce que Juifs». Similairement, l'UEJF s'est dit alarmé «de l'effacement du problème de l'antisémitisme» dans cette tribune.

«Si je ne doute pas des bonnes intentions des auteurs de cet appel, je ne m'explique pas leur indifférence face à l'antisémitisme, qui est pourtant une composante essentielle de l'islamisme radical», a précisé le président de l'association étudiante, Sacha Reingewirtz.

«Une démission par rapport à l'idée même de citoyenneté française»

Le texte des «Français et musulmans» n'a pas interpellé que les associations luttant contre l'antisémitisme. La sénatrice (EELV) Esther Benbassa a en effet relevé l'absence des victimes de l'Hyper Casher dans la tribune...

... tandis que l'anciennne ministre de Nicolas Sarkozy Rama Yade est allée jusqu'à qualifier le texte de «démission par rapport à l'idée même de citoyenneté française».

Le sénateur de Paris (PS) David Assouline, quant à lui, a souligné «une faute» au sujet de l'omission des victimes juives, tout en saluant le reste de la tribune.

Chez Les Républicains, le porte-parole du parti pour les questions européennes, Philippe Juvin, a fait part de son malaise à la lecture de l'appel des 42 Français musulmans.

Du côté des journalistes, Jean Birnbaum du Monde s'est également étonné de l'absence des victimes de l'Hyper Casher.

Un faux procès, selon les auteurs de la tribune

Réagissant à cette polémique, l'un des cosignataires du texte, la psychiatre spécialiste en addictologie Amine Benyamina, a regretté un «faux procès». Les auteurs de la tribune sont «au-dessus de tout soupçon de choix des victimes», a-t-elle assuré lundi matin au micro d'Europe 1. 

De même, la sénatrice socialiste Bariza Khiari, autre personnalité ayant signé l'appel, a déclaré sur Facebook qu'elle et les autres cosignataires tenaient «à dire avec la plus grande clarté [qu'ils ne font] aucune différence entre les victimes du terrorisme aveugle qui frappe notre nation depuis de nombreux mois».

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