France

La campagne du gouvernement contre les discriminations à l’embauche est-elle déjà un fiasco ?

Ce lundi 18 avril, le gouvernement a lancé une campagne de sensibilisation aux discriminations à l’embauche liée à l’origine. Une opération de communication qui est loin d’avoir fait l’unanimité au sein de la classe politique et chez les internautes.

«Les compétences d'abord», tel est l’intitulé de la campagne de communication visant à sensibiliser et à lutter contre le «sentiment d’humiliation» que peuvent éprouver les diplômés des quartiers populaires en raison de leur origine. Dès mardi et pendant une durée de 15 jours, près de 2 000 affiches seront déployées à travers la France.

Chaque affiche fusionne les visages d'un candidat blanc et d'un candidat de couleur. Au visage blanc est associée une réponse positive de recruteur – «bienvenue dans l'équipe, à demain», «vous commencez lundi», au visage de couleur une réponse négative – «on vous rappelle», «désolé, on ne cherche personne», «vous n'avez pas le profil», rapporte l'AFP. 

«Ces discriminations ne sont pas la conséquence de politiques de recrutement ouvertement racistes ou sexistes, mais de successions de petites décisions, de préjugés, parfois de petites lâchetés», a estimé la ministre du Travail Myriam El Khomri lors du lancement de la campagne. «A diplôme égal, il y a deux fois plus de chômage chez les jeunes des quartiers populaires», a-t-elle déploré devant la presse. «Cela crée un sentiment d'humiliation terrible, cela montre encore les barrages, les frontières qui existent dans notre société.» Pour sa part, le ministre de la ville Patrick Kanner a estimé qu’«un jeune diplômé qui se sent discriminé dans ces quartiers, c'est un jeune qui peut devenir une proie». 

Entre sarcasme et colère, la campagne tente difficilement d'éviter le bad buzz

Si pour l'heure, la campagne de sensibilisation peine à recueillir un soutien massif, ses détracteurs sont bel et bien nombreux. Certains ont choisi l'humour pour décrier cette initiative. Le gouvernement est, sans surprise, en première ligne des sarcasmes notamment sur twitter. 

Quelques twittos ont même diffusé leur propre photomontage en mêlant différentes personnalités politiques à l'instar de François Hollande, de son prédécesseur Nicolas Sarkozy et de la présidente du Front national Marine Le Pen, faisant ainsi écho à la prochaine présidentielle. 

D'autres ont plutôt exprimé leur colère de voir le gouvernement se focaliser sur l'origine et tentent de mettre en exergue que cette discrimination ne constitue pas le seul obstacle pour obtenir du travail. 

Côté politique, les réactions se font rares. Le maire Front national de Fréjus, David Racheline, a d'ores et déjà critiqué ce qu'il estime sous la forme d'une question rhétorique que le gouvernement applique actuellement une politique de discrimination «positive» qualifiée d'«insidieuse» et «anti-méritocratique». 

Selon une étude de l'Institut Montaigne, les hommes perçus comme musulmans pratiquants ont quatre fois moins de chances d'être convoqués à un entretien d'embauche que les hommes perçus comme catholiques pratiquants. Simultanément à cette opération de sensibilisation, le gouvernement a lancé récemment deux campagnes de «testing» auprès de «plusieurs dizaines d'entreprises de plus de 1 000 salariés» et dans la fonction publique. Les résultats sont attendus en septembre.

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