Il serait temps qu'Emmanuel Macron s'occupe de la France et des «Français ordinaires» plutôt que de l'Ukraine : c'est en substance ce que Dmitri Medvedev, ancien président russe et actuel vice-président du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, a voulu faire savoir sur Twitter, le 1er juillet, alors que l'Hexagone se prépare pour une cinquième nuit d'émeutes à la suite du décès de Nahel, l'adolescent de 17 ans tué lors d'un contrôle de police.
La critique est rude, mais d'autres dirigeants, dont les pays entretiennent des relations pourtant moins tendues avec Paris, ont eux aussi vertement critiqué la situation française.
«Nous ne voulons pas de scènes comme celle-ci dans aucune ville d'Europe»
«Boutiques pillées, voitures de police incendiées, barricades dans les rues – c'est ce qui se passe actuellement dans le centre de Paris et dans de nombreuses autres villes françaises», a tweeté le président du Conseil polonais Mateusz Morawiecki, en plein sommet de l'UE sur la politique migratoire, où est débattue la répartition des demandeurs d'asile dans l'UE. «Nous ne voulons pas de telles scènes dans les rues polonaises. Nous ne voulons pas de scènes comme celle-ci dans aucune ville d'Europe». Mateusz Morawiecki a appuyé ses dires avec une vidéo des émeutes en France, leur opposant la vie paisible en Pologne.
Le dirigeant hongrois Viktor Orban, lui aussi critique de la politique migratoire de l'UE, a simplement déclaré durant ce débat que la Hongrie refusait de voir «des ghettos de migrants» sur son sol, sans toutefois mentionner nommément la France.
De l'autre côté du Rhin, Berlin a déclaré le 30 juin observer «avec une certaine inquiétude ce qui se passe en France», par l'intermédiaire du porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Hebestreit, bien qu'il ait affirmé que le président français et son gouvernement s'efforçaient «très activement de surmonter» la crise actuelle.
L'Algérie, directement concernée par le drame – Nahel était un binational, franco-algérien –, a affirmé par l'intermédiaire de son ministère des Affaires étrangères «faire confiance» au gouvernement français pour assurer son «devoir de protection» de ses ressortissants, tout en se disant «soucieux de leur quiétude».
L'Iran ne manque pas l'occasion de retourner à Paris ses critiques
L'Iran a appelé le 2 juillet le gouvernement français à «mettre fin au traitement violent» de sa population et à faire «preuve de retenue» dans la crise provoquée par la mort d'un jeune homme tué par un policier. En octobre 2022, Nasser Kanani, porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, avait ainsi dénoncé l'«ingérence» du président Emmanuel Macron qui avait exprimé son soutien aux manifestants en Iran.
«Le gouvernement français doit mettre fin au traitement violent de sa population en respectant les principes de dignité humaine, la liberté d'expression et le droit des citoyens à manifester pacifiquement», a-t-il insisté. Pour le porte-parole, «les relations discriminatoires avec la population immigrée et le fait d'éviter d'accepter et de corriger les mauvais comportements à son égard par certains pays européens ont créé des conditions défavorables pour les citoyens européens, y compris en France».
Accusation de racisme à l'ONU
Bien plus critique, la porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, Ravina Shamdasani, a estimé le 30 juin que c'était «le moment pour le pays de s'attaquer sérieusement aux profonds problèmes de racisme et de discrimination raciale parmi les forces de l'ordre».
Une accusation à laquelle le ministère français des Affaires étrangères a répondu, affirmant que toute accusation de racisme ou de discrimination systémique par les forces de l'ordre en France était «totalement infondée». «Le dernier examen périodique universel auquel notre pays s'est soumis nous a permis d'en faire la démonstration», a souligné le ministère. «La France et ses forces de l'ordre luttent avec détermination contre le racisme et toutes les formes de discriminations», a-t-il ajouté. «Aucun doute n'est permis dans cet engagement», s'est défendu le Quai d'Orsay.
Pékin s'inquiète pour ses ressortissants, dont un car a été caillassé
Plusieurs pays européens, dont le Royaume-Uni, ont mis à jour leurs conseils aux voyageurs en leur recommandant de ne pas se rendre dans les zones concernées par les violences.
Le consulat de Chine à Marseille a aussi invité les citoyens chinois à «être vigilants et à faire preuve de prudence» après que les médias d'État ont rapporté qu'un bus transportant des touristes chinois, à Marseille, avait été la cible de jets de pierres le 30 juin.
La mort de Nahel M., dont la famille est originaire d'Algérie, a ravivé le sujet des violences policières et du refus d'obtempérer en France, où 13 personnes sont mortes à l'issue d'un contrôle de police l'an dernier. Les émeutes relancent de surcroît le débat sur l'insécurité liée à l'immigration de masse et le défi de l'intégration.