Plusieurs secteurs ont poursuivi la grève le 8 mars, au lendemain des mobilisations nationales contre le projet de réforme des retraites.
Blocages à la sortie des raffineries
Les expéditions de carburants sont toujours bloquées au 8 mars à la sortie des raffineries de TotalEnergies et d'Esso-ExxonMobil en France, avec souvent comme but de tenir jusqu'au 10 mars au moins. Le gigantesque dépôt de carburants de TotalEnergies près de Dunkerque, à Mardyck, devrait même rester complètement bloqué jusqu'au 15 mars, affirme par exemple à l'AFP le syndicaliste Force ouvrière Clément Mortier.
Les raffineries continuent de produire du carburant mais celui-ci doit, jusqu'à nouvel ordre, être stocké sur place, faute de pouvoir sortir. Quand les réserves sur site seront pleines, les raffineries devront s'arrêter, mais cela n'arriverait qu'après plusieurs jours voire semaines de blocages. En attendant, les 10 000 stations de France comptent sur 200 dépôts de carburants. L'un a été bloqué plusieurs heures à Ambès, sur l’estuaire de la Gironde.
Le manque de carburants commence à se faire ressentir dans les stations, mis par les pétroliers sur le compte d'une ruée des automobilistes.
Le gaz se réduit
L'alimentation du réseau français de gaz (les gazoducs gérés par GRTgaz) vers les clients est maintenue, mais les volumes envoyés depuis les sites de stockage souterrains Storengy sont désormais réduits «entre 30 et 40%», a annoncé à l'AFP Frédéric Ben, responsable du gaz à la CGT Energie, qui avait lancé un ultimatum à cette filiale d'Engie gérant la plupart des réserves françaises, dans des cavités naturelles.
La société confirme à l'AFP, mais assure que les clients ne sont pas affectés pour l'instant.
Plus aucun gaz naturel liquéfié (GNL) n'est par ailleurs déchargé des navires depuis le 7 mars, les quatre terminaux méthaniers portuaires du pays étant bloqué par les grévistes.
Du gaz continue d'arriver par gazoduc de Norvège ou d'Espagne.
Des centrales électriques au ralenti
Les grévistes d'EDF ont pris en main une partie des centrales nucléaires, thermiques et hydroélectriques en France et retiré 15 000 mégawatts (MW) du réseau électrique le 8 mars après-midi, selon Sébastien Ménesplier, secrétaire général de la CGT Energie – ce qui est largement supérieur aux journées de grèves précédentes. EDF évoque une perte de puissance de 7 447 MW.
Le gestionnaire des lignes à haute et très haute tension, RTE, surveille de près pour éviter des coupures, et a ordonné un arrêt des baisses dans la matinée pour «passer la pointe de consommation du matin», a-t-il souligné à l'AFP.
Des coupures
Les coupures sauvages de courant se multiplient par ailleurs dans le pays, à l'initiative d'agents d'Enedis : un dépôt d'Amazon près de Pau ; à Brignoles, dans le Var (sous-préfecture) ; et des producteurs d’énergies renouvelables en Corrèze et dans l’Allier, selon Enedis.
La ville d'Annonay, fief du ministre Olivier Dussopt ainsi que la permanence du président du Sénat Gérard Larcher à Rambouillet, ont également subi des coupures le 7 mars, provoquant la fureur du gouvernement et des plaintes (systématiques) d'Enedis.
Dans les transports, vers une amélioration
Un train sur trois roulait le 8 mars à la SNCF, soit mieux que les 20% du 7 mars. La grève continuera le 9 mars et au moins jusqu'au 10 mars mais le trafic s'améliorera, a affirmé le ministre chargé des Transports, Clément Beaune, sur LCI le 8 mars.
Aucun train ne roulait en Corse.
A Paris, dans les transports en commun gérés par la RATP, le trafic s'est amélioré par rapport à la veille dans le RER, était quasiment normal pour les bus et les tramways, et le métro roulait mieux que le 7 mars, mais toujours très mal : entre un quart et la moitié du service habituel était prévu.
Dans l'aérien, entre 20 et 30% des vols devront être annulés les 9 et 10 mars, comme les 7 et 8 mars, a demandé la Direction générale de l'aviation civile (DGAC).
Blocages massifs dans les ports
La grève est très suivie par les dockers. Les ports du Havre, premier de France pour les conteneurs, de Rouen, premier port céréalier d'Europe de l'Ouest, de Brest, de Bayonne et de La Rochelle étaient bloqués ce 8 mars. Le blocage de celui de Marseille-Fos, qui s'étend sur une surface équivalente à Paris, a été levé dans la journée, selon une source syndicale.
Plusieurs cas de grèves chez les éboueurs
Les poubelles commencent à s'entasser dans plusieurs arrondissements de Paris, où 35% des éboueurs municipaux sont en grève selon Régis Vieceli, secrétaire général du syndicat CGT nettoiement (FTDNEEA), ainsi qu'à Niort.
Des blocages universitaires
Des blocages, souvent partiels, ont eu lieu dans plusieurs établissements d'enseignement supérieur le 8 mars, avant une journée de mobilisation et d'action de la jeunesse le 9 mars, avec une manifestation et un rassemblement dans la capitale prévus dans l'après-midi.
Le syndicat étudiant L'Alternative a compté le 8 mars à la mi-journée des blocages dans une trentaine d'établissements dont les universités de Grenoble, La Rochelle, Lille 2, Lyon 2 et 3, Rennes 2, Mulhouse, Dijon, Nantes ou Nanterre, plusieurs instituts d'études politiques ou des écoles nationales supérieures d'architecture comme celles de Clermont, Grenoble ou Paris-Belleville.
A SciencesPo Paris précisément, une trentaine d'étudiants se sont rassemblés devant l'établissement rue Saint-Guillaume et ont bloqué l'entrée du site avec des poubelles. L'IEP de Lille a également été bloqué et «l'ensemble des enseignements» sont passés en distanciel «jusqu'à samedi [11 mars] inclus [pour] assurer au mieux la continuité des cours», selon un message de la direction de l'école.
A Lille 2, le campus de Moulin a été bloqué le matin par «une trentaine d'étudiants», selon l'université. Le campus a été «partiellement fermé».
Du côté des lycées, six blocages d'établissements et huit barrages filtrants ont été recensés par le ministère de l’Education, ainsi que «quelques rassemblements» sans perturbations.
Ces mobilisations ont eu lieu à la veille d'une «journée d'action et de mobilisation de la jeunesse» le 9 mars pour «dénoncer et mettre en lumière l'impact de la réforme sur les jeunes, et imposer une véritable mise en protection sociale des jeunes», à l'initiative de plusieurs organisations dont des syndicats étudiants (Unef, Alternative et Fage), de la Voix Lycéenne ou d'organisations politiques (Jeunes socialistes, Jeunes insoumis, Jeunes écologistes...).