Une épidémie qui vient confirmer les grandes difficultés auxquelles fait face le système de santé français : apparue courant octobre, la bronchiolite, maladie qui entraîne de la toux chez les nouveaux-nés et nécessite parfois leur hospitalisation, s'est propagée sur le territoire et a débordé les services d'urgence pédiatriques, particulièrement en Ile-de-France. Face à la gravité de la situation, 31 enfants ont dû être transférés, y compris en pleine nuit, vers d'autres régions et villes moins touchées, dont Amiens et Rouen.
Les soignants dénoncent une crise venue de loin
«On n'est plus capables de faire face à un pic épidémique», a dénoncé le 1er novembre sur France Info Christèle Gras-Le Guen, présidente de la Société française de pédiatrie, qui a qualifié la crise actuelle d'«historique» et déploré le fait que «tout le système de santé de l'enfant est négligé depuis des années».
Le ministre de la Santé François Braun doit recevoir ce 2 novembre les professionnels de la pédiatrie pour discuter de l'avenir de cette filière, en crise, comme d'autres, en raison de conditions de travail insatisfaisantes et d'un manque de personnel.
Le 22 octobre, un collectif de 7 000 soignants en pédiatrie avait adressé une lettre ouverte à Emmanuel Macron pour déplorer ces conditions de travail et une prise en charge inadaptées, résultant selon eux d'une «inaction politique irresponsable», ce qui a conduit le gouvernement à annoncer un «plan d'action immédiat», incluant le déblocage de 150 millions d'euros pour «les services en tension de l'hôpital» et l'organisation d'«assises de la pédiatrie» au printemps.
Ces mesures n'ont cependant pas calmé le jeu, puisqu'elles ont été qualifiées d'«inadéquates» et de «cyniques» par le collectif Pédiatrie à l'origine de la lettre adressée au président de la République. Le collectif a annoncé que certains de ses représentants se rendraient le 2 novembre à l’Elysée.
Les oppositions appellent le gouvernement à empêcher «l'effondrement» de l'hôpital public
A l'unisson des soignants, les oppositions ont dénoncé la gestion gouvernementale : la présidente du groupe du Rassemblement national à l'Assemblée Marine Le Pen y a vu «une nouvelle preuve de l’effondrement de notre système de santé», mettant en garde le gouvernement qui «ne pourra pas compter éternellement sur l’abnégation de nos soignants pour faire face».
Le leader des Patriotes Florian Philippot a utilisé les mêmes mots en stigmatisant l'«effondrement de l’hôpital» incarné selon lui par l'appel aux parents à ne pas se rendre systématiquement dans les services d'urgence lancé par le ministre de la Santé sur France Bleu. Il a rappelé que dans le même temps, le gouvernement «continue de refuser de réintégrer les 15 000 soignants suspendus» car non-vaccinés contre le Covid-19, ce qui constitue à ses yeux une «folie totale».
La socialiste Ségolène Royal a quant à elle mis en perspective la crise actuelle avec le débat sur l'immigration et les titres de séjour envisagés par le gouvernement dans des secteurs en tension tels que celui de la restauration. «Pendant ce temps, des bébés sont en danger faute de personnels médicaux, mal payés ni considérés malgré les promesses», a-t-elle déploré, faisant référence aux engagements du gouvernement à améliorer la condition des soignants après la crise du Covid-19. «Où sont les valeurs de l’Etat pour qu’un tel problème ne soit plus une priorité ?», a-t-elle interrogé sur Twitter.
La crise des services pédiatriques avait déjà été dénoncée en octobre 2021 par le Collectif inter-hôpitaux (CIH), qui avait sonné l’alarme en évoquant une situation d’autant plus «grave» que «l’hôpital public est le seul recours en médecine pédiatrique». L'épidémie de bronchiolite avait également démarré plus tôt qu'à l'accoutumée et déjà entraîné des transferts d'enfants malades.