L'Assemblée nationale a adopté le 11 octobre en première lecture le projet de loi amorçant une nouvelle réforme de l'assurance chômage, avec le soutien des députés LR mais sous les critiques de la gauche et du RN.
Le vote de ces «mesures d'urgence» en vue du «plein emploi» a été acquis par 303 voix contre 249, et 11 abstentions. Le texte sera examiné par le Sénat à partir du 25 octobre. Il prévoit dans un premier temps de prolonger les règles actuelles de l'assurance chômage, issues d'une réforme chaudement contestée du premier quinquennat Macron.
Et il enclenche la possibilité, par décret, de moduler l'assurance chômage afin qu'elle soit «plus stricte quand trop d'emplois sont non pourvus, plus généreuse quand le chômage est élevé», selon les mots d'Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle.
Une telle réforme serait approuvée par une courte majorité des Français : 53% contre 47%, selon un sondage Odoxa pour Challenges et BFM Business.
Il s'agit de «faire en sorte d'être plus réactif, plus incitatif» à la reprise d'emploi, selon le ministre du Travail Olivier Dussopt, qui a porté le projet de loi la semaine précédente dans l'hémicycle. Il s'est engagé à ne pas toucher «au montant des indemnités», mais les conditions d'entrée dans le régime (six mois travaillés sur vingt-quatre aujourd'hui) et la durée d'indemnisation pourraient évoluer.
Un «chèque en blanc» pour le gouvernement ?
Après une phase de concertation avec les partenaires sociaux à compter de la semaine prochaine, le gouvernement décidera par décret de la forme que prendra cette modulation de l'assurance chômage, pour une entrée en vigueur début 2023.
Gauche et RN ont pilonné ces perspectives. C'est «au boulot les fainéants» : «Ce texte n'exprime rien de plus que votre haine viscérale de ceux privés d'emploi», a tonné Mathilde Panot (LFI), quand le communiste Pierre Dharréville a repris la chanson de Bernard Lavilliers, «J'voudrais travailler encore, travailler encore». Arthur Delaporte (PS) a aussi critiqué la demande de «chèque en blanc» par le gouvernement.
Pour le groupe RN, Laure Lavalette a jugé que le projet de loi ne présentait «aucune mesure permettant de ramener durablement vers l'emploi» et portait «un nouveau coup de rabot dans notre système de protection sociale».
LR valide par esprit de «responsabilité»
A l'inverse, au nom des députés Renaissance, Astrid Panosyan a défendu «un texte nécessaire, efficace et juste», en rejetant «les promoteurs du droit à la paresse» à gauche comme les tenants d'une «préférence nationale» pour l'emploi à l'extrême droite.
Si les députés LR ont approuvé le projet de loi, c'est par esprit de «responsabilité», a souligné l'un des leurs, Stéphane Viry, qui «attend encore» une vraie réforme de l'assurance chômage face aux pénuries de main-d'œuvre dans le BTP ou l'hôtellerie.
Viser le «plein emploi» ?
Le gouvernement voit la modulation comme une première brique pour atteindre l'objectif de plein emploi en 2027, soit un taux de chômage d'environ 5% contre 7,4% actuellement. Au sortir de ces séances de rentrée parfois mouvementées, le rapporteur Marc Ferracci (Renaissance) s'est félicité qu'il n'y ait pas eu «de mauvaises surprises», malgré des votes parfois serrés, et que le projet de loi n'ait pas été «dénaturé».
Avec l'aval du ministre du Travail, les députés ont voté pour une «application très différenciée» de la modulation en outre-mer, plus durement frappée par le chômage. Par des amendements Renaissance, Modem, Horizons et LR, ils ont décidé que les «abandons de poste» seront assimilés à des démissions, pour limiter l'accès à l'assurance chômage.
Un autre volet du projet de loi prévoit d'étendre la validation des acquis de l'expérience (VAE) aux «proches aidants et aidants familiaux», pour leur faciliter l'accès aux métiers du grand âge.
L'Assemblée a acté la création d'un «véritable service public» de la VAE, encore peu utilisée en raison notamment de sa complexité. Un «guichet unique» sera proposé via une plateforme numérique.