Economie

Afghanistan : avec le départ des troupes US les ventes de pétrole iranien repartent

Avec le départ des troupes américaines les ventes de pétrole Iranien en Afghanistan repartent de plus belle. Cette fois, ce n’est pas en dépit des sanctions mais à l’invitation officielle du gouvernement…taliban et sunnite.

«Les Taliban ont envoyé des messages à l'Iran disant : "vous pouvez continuer les exportations de produits pétroliers"», a déclaré à Reuters Hamid Hosseini, membre du conseil d'administration et porte-parole de l'Union iranienne des exportateurs de pétrole, de gaz et de produits pétrochimiques, (OPEX) à Téhéran.

L’organisation sunnite qui a pris le pouvoir à Kaboul a également envoyé des messages aux traders iraniens et à une chambre de commerce proche du gouvernement. En conséquence, l'Administration des douanes de la République islamique d'Iran (IRICA) a levé l'interdiction des exportations de carburant vers l'Afghanistan, qui était en vigueur depuis le 6 août en raison des préoccupations de l'Iran concernant la sécurité du commerce. Ces inquiétudes ont été atténuées par l'attitude des Taliban, selon le dirigeant de l’OPEX.

Le prix de l'essence en Afghanistan a atteint 900 dollars la tonne, conséquence de la ruée automobile de nombreux Afghans pour quitter les villes et notamment Kaboul. Pour contrer la flambée des prix, les Taliban ont demandé à l'Iran de maintenir les frontières ouvertes pour les traders. Le représentant des exportateurs iraniens de pétrole a également salué la décision des Taliban de réduire les taxes sur les importations de carburant en provenance d'Iran et d'autres pays voisins. Selon un document à l’en-tête de l'Emirat islamique d'Afghanistan – le nom par lequel les Taliban se désignent, montré à Reuters, une remise de 70% doit être appliquée aux taxes douanières prélevées sur les importations d'essence, de diesel et de propane des pays voisins vers l'Afghanistan.

Le pétrole iranien – officiellement sous sanctions américaines depuis 2018 – a continué à pénétrer par camions en territoire afghan sous occupation étrangère dominée par les Etats-Unis. Et, selon Hamid Hosseini, le retrait des troupes américaines a rendu les dirigeants iraniens et le nouveau pouvoir afghan moins hésitants à traiter ouvertement. Les exportations iraniennes d’essence et de gasoil vers l'Afghanistan passent par différentes filières plus ou moins légales qui rendent hasardeuse l’estimation de leurs flux annuels.

Entre 400 000 et un million de tonnes par an

Par exemple, selon un rapport publié par PetroView, plateforme iranienne de recherche et de conseil sur le pétrole et le gaz, l’Iran a exporté environ 400 000 tonnes de carburant vers son voisin de mai 2020 à mai 2021. Selon le rapport établi par le ministère afghan des Finances, ces importations d’Iran auraient représenté 367 millions de dollars (312 millions d’euros), devant les deux autres fournisseurs de pétrole les plus importants : Turkménistan et Ouzbékistan avec des échanges, principalement de pétrole, évalués respectivement à 257 millions de dollars (218 millions d’euros) et 236 millions de dollars (201 millions d’euros).

Mais selon une source ayant une connaissance directe de ces marchés et citée par Reuters, plus d'un million de tonnes par an, soit plus de 20 000 barils par jour, de carburant iranien sont en réalité acheminés vers l'Afghanistan.

Et l'Iran pourrait facilement doubler le volume de ce commerce si l’on en croit les commentaires du représentant de l’OPEX. «Le gouvernement de [Achraf] Ghani a tenté de limiter la coopération avec l'Iran à partir du rétablissement des sanctions américaines [2018]», explique Hamid Hosseini. Mais l'Afghanistan reste très dépendant de ses voisins car il n'a pas développé sa propre industrie pétrolière. Le pays compte six mini-raffineries qui ne produisent chacune que quelques milliers de barils par jour. Elles fonctionnent au fioul léger du Turkménistan dont les deux raffineries fournissent également directement du diesel et de l’essence. Les deux principales raffineries d'Ouzbékistan fournissent également des produits raffinés par fret ferroviaire et par camion. «Le problème, c'est que les banques ont cessé de fonctionner il y a trois jours, nous pourrions donc revenir aux sacs d'argent", a déclaré la source.