«La France contribuera jusqu’à hauteur de 4 milliards d'euros pour renforcer les fonds propres d'Air France et aider la compagnie aérienne à faire face aux difficultés financières résultant de l'épidémie de coronavirus», explique la vice-présidente de la Commission européenne chargée de la concurrence Margrethe Vestager dans un communiqué publié ce 6 avril.
Sur ces 4 milliards, 3 ont été déjà été versés au Holding Air France-KLM en 2020 dans le cadre d’un prêt de 7 milliards d’euros. Ils seront convertis en «un instrument de capital hybride [à mi-chemin entre une part du capital et un titre de dette]». En outre l’Etat pourra apporter un milliard d’euros via une augmentation de capital «ouverte aux actionnaires existants et au marché».
Interviewé sur France Inter dans la matinée le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance Bruno Le Maire a laissé entendre que la participation de l’Etat au capital d’Air France pourrait être «d’un petit peu moins de 30% [contre 14,3% actuellement] pour ne pas prendre le capital complet de l’entreprise».
L’AFP précise que parmi les plus gros actionnaires d'Air France-KLM, seuls l'Etat français et China Eastern – qui détient actuellement 8,8% des parts – participeront à l'augmentation de capital, la compagnie chinoise s'engageant à rester en-dessous de 10%. Le groupe américain Delta Air Lines, actuellement actionnaire à la même hauteur que China Eastern, ne participera pas à l'opération car la réglementation américaine le lui interdit.
Quant à l'Etat néerlandais, qui possède actuellement 14%, il ne participera pas à l’augmentation de capital et sa participation sera mathématiquement réduite à l'issue de l'opération. Mais, alors qu’il était monté sans concertation avec Paris au capital du holding en 2019 – officiellement pour défendre les intérêts des Pays-Bas – le gouvernement néerlandais a cette fois jugé dans une lettre adressée le 6 avril au Parlement et citée par Reuters : «Ce changement de proportion d'actionnaires n'a aucune conséquence sur la préservation des intérêts publics.»
Une série de conditions
Le soutien public de Paris approuvé par Bruxelles s'accompagnera toutefois d’une série de conditions : Air France devra d'abord mettre à disposition des transporteurs concurrents 18 créneaux horaires sur l'aéroport congestionné de Paris Orly. Toutefois, ces mesures exigent que le transporteur concurrent «base ses avions et ses équipages à l'aéroport de Paris Orly, dans le respect des législations nationales et européennes du travail», selon le communiqué de la commission.
«Ça a été un des points durs de la négociation, nous ne voulons pas de dumping social ou de dumping fiscal de la part des compagnies aériennes qui récupéreraient ces créneaux horaires», a répondu le ministre pressé par la journaliste Léa Salamé de dire si ces créneaux pouvaient être attribués à des compagnies low-cost comme Ryan Air.
Parmi les conditions pour autoriser le plan d’aide, il est aussi prévu que l'Etat français «recevra une rémunération appropriée» et devra présenter sous 12 mois un plan pour réduire, à terme, sa participation au capital. En outre Air France et sa holding seront soumis à une interdiction de verser des dividendes et de racheter des actions tant que la recapitalisation n'aura pas été remboursée à 100%. De plus «une strict limitation de la rémunération de l’encadrement incluant une interdiction des bonus est appliqué jusqu’à ce que 75% de l’avance de l’Etat actionnaire convertie en capital ait été remboursée.
KLM, le partenaire néerlandais au sein du groupe Air France-KLM, ne bénéficiera pas de l'aide, selon la Commission européenne. Air France-KLM a annoncé le 6 avril prévoir une perte d'exploitation de 1,3 milliard d'euros au premier trimestre 2021 mais son directeur général Benjamin Smith a jugé que l'aide publique lui apporterait «une plus grande stabilité pour aller de l'avant lorsque la reprise commencera». L'entreprise a assuré dans la foulée qu'elle prévoyait toujours pour cette année «une reprise significative de la demande».
Les marchés ont réagi à l’annonce du plan d’aide de façon contradictoire, le titre Air France – KLM gagnant plus de 2% à l’ouverture avant de céder 0,55% à la mi-journée.