Economie

Feu vert conditionnel de Bruxelles au sauvetage d'Areva, mis sous perfusion

Areva a obtenu l'aval de principe de Bruxelles à son plan de sauvetage. Mais les conditions posées à la recapitalisation du spécialiste français du nucléaire repoussent son renflouement à cet été, au mieux.

Sous la houlette de l'Etat français, son actionnaire à 86,5%, Areva est engagé dans un plan de sauvetage en deux volets : une augmentation de capital d'un montant de 5 milliards d'euros et la cession de son activité réacteurs (Areva NP) à EDF pour permettre au futur groupe de se recentrer sur le cycle du combustible.

Ces mesures doivent lui permettre de se relever de lourds revers imputables aux déboires de la construction de son réacteur EPR en Finlande, au fiasco financier de l'acquisition de l'entreprise minière canadienne Uramin et à la morosité du secteur depuis l'accident de Fukushima (Japon) en 2011.

«Le plan de restructuration d'Areva permettra à l'entreprise de devenir viable sans fausser indûment la concurrence au sein du marché unique», a estimé le 10 janvier la Commission européenne dans un communiqué.

Areva a obtenu mi-décembre la promesse d'investisseurs étrangers - les groupes japonais MHI et JNFL, selon une source proche du dossier - de participer à son renflouement. Ils se sont engagés à débourser 500 millions d'euros en échange de 10% du capital de New Co, le nouvel Areva dont les activités iront de l'extraction de l'uranium à son enrichissement en passant par le traitement des déchets et le démantèlement des centrales.

L'Etat, qui s'était engagé à assurer le succès de l'opération, prendra le reste en charge, à savoir 4,5 milliards d'euros, après le feu vert de Bruxelles qui a considéré que cette injection de capitaux était «conforme aux règles de l'UE en matière d'aides d'Etat».  

Conseil d'administration le 11 janvier

«La cession complète de l'activité réacteurs d'Areva réduira sensiblement les opérations du groupe dans le secteur nucléaire et limitera ainsi les distorsions de concurrence induites par l'aide publique. La compétitivité d'Areva contribuera également à garantir la sécurité de l'approvisionnement en uranium de l'Europe», a justifié l'exécutif européen.

«C'est une décision positive. Nous venons de franchir une nouvelle étape dans la restructuration du groupe», a commenté une porte-parole du groupe. 

L'Elysée s'est également réjoui de cette «étape majeure pour la mise en œuvre des grandes orientations de la refondation de la filière nucléaire française». 

Ce feu vert européen est toutefois soumis à deux conditions : l'autorisation de la cession d'Areva NP en vertu des règles européennes sur les concentrations et «la conclusion positive» des essais destinés à démontrer la conformité de la cuve du réacteur EPR en chantier à Flamanville (Manche), dont l'acier présente une concentration excessive en carbone susceptible d'amoindrir sa résistance. 

EDF, qui orchestre le chantier, et Areva se disent confiants. Mais l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) n'a prévu de rendre son avis, déterminant, que vers la fin du premier semestre, repoussant d'autant les opérations de recapitalisation que le groupe espérait pouvoir lancer dès février. 

Concernant la cession de la division réacteurs, «les autorités françaises que je représente ici sont plutôt confiantes quant à la réalisation de cette condition dès le mois d'avril», a déclaré le secrétaire d'Etat à l'Industrie, Christophe Sirugue, lors d'un débat sur l'avenir du nucléaire à l'Assemblée nationale dans la nuit du 10 au 11 janvier.

En attendant, pour sortir Areva de l'ornière financière alors qu'un crédit-relais bancaire de 1,2 milliard d'euros arrive à échéance en janvier, l'Etat a consenti au groupe un prêt d'actionnaire de 3,3 milliards d'euros, approuvé par Bruxelles. 

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Dans un communiqué séparé, le spécialiste de l'atome a annoncé qu'il réunirait son conseil d'administration le 11 janvier pour définir les modalités de l'augmentation de capital d'Areva SA, la holding de tête du futur groupe à qui sont destinés deux milliards d'euros, les trois autres milliards revenant à NewCo. Une assemblée générale d'Areva SA reste convoquée le 3 février.

L'action Areva, suspendue à la Bourse de Paris avant ces annonces, le restera «jusqu'à la publication d'un nouveau communiqué», a prévenu le groupe.