Le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) a retiré les accréditations des journalistes et les autorisations de reportages de la chaîne d'information qatarie Al Jazeera après un entretien avec l'un des dirigeants du groupe rebelle M23. «Pour apologie du terrorisme, nous avons décidé de retirer l’accréditation accordée aux journalistes d’Al Jazeera», a déclaré Patrick Muyaya, ministre de la Communication et des Médias et porte-parole du gouvernement, lors d’une conférence de presse le 9 janvier relayée par les médias.
Al Jazeera avait diffusé la veille une interview de Bertrand Bisimwa, un des chefs du mouvement rebelle M23. Dans cette interview, celui-ci avait revendiqué des avancées militaires sur le terrain et affirmé que le M23 menait une «guerre existentielle». L’entretien intervenait alors que la Mission des Nations unies en RDC (Monusco) avait condamné le 7 janvier «avec la plus grande fermeté» l’expansion territoriale menée par ces rebelles.
Le porte-parole du gouvernement congolais a jugé que l'interview de Bertrand Bisimwa par Al Jazeera équivalait à «une apologie du terrorisme» et était «totalement inacceptable», exhortant les journalistes à «ne pas donner la parole aux terroristes», ce qui constitue, selon lui, une ligne rouge.
Le ministre a également fustigé la chaîne pour ne pas avoir confié cet entretien à un membre de son équipe de journalistes mais à une «chercheuse militante» réputée «pro-rwandaise», ne détenant «ni accréditation, ni visa», qualifiant cet acte de «porte d'entrée à la manipulation et à l’intrusion».
Les médias français dans le collimateur
Récemment, le Conseil supérieur de l'audiovisuel et de la communication (CSAC), l'autorité de régulation de la RDC, a mis en garde la radio française RFI et les chaînes France 24 et TV5 Monde contre toute diffusion d’informations à même de désorienter la perception de la situation sécuritaire dans la province du Nord-Kivu, à l’est du pays.
«Je constate avec amertume que certains médias, comme RFI, TV5 Monde et France 24, relaient les prétendues avancées des terroristes tout en occultant les exploits des FARDC. Nous respectons la liberté d’expression et d’information, mais nous fustigeons fermement toute apologie du terrorisme», avait déclaré le président du Conseil, Christian Bosembe, cité par les médias locaux.
Lors d’une réunion du Conseil supérieur de la défense élargie le 8 janvier, le président Félix Tshisekedi a appelé les Congolais à faire confiance aux efforts du gouvernement pour faire face à l’expansion du M23. «Nos troupes ont repris l'initiative et, vous allez voir que dans les jours qui viennent, […] les pans du territoire qui sont occupés par les forces d'agression seront tous récupérés un par un», a déclaré de son côté le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya.
Alors que l’armée de la RDC (FARDC) tente de contenir les rebelles, les efforts diplomatiques, tels que le processus de Luanda, peinent à produire des résultats concrets face à l'absence de coopération du Rwanda. Ce dernier, accusé de soutenir logistiquement et militairement le M23, a refusé de participer à une réunion tripartite le 15 décembre dernier, censée établir une feuille de route vers la paix.