«Si les Français apparaissent dans la zone de conflit, ils deviendront inévitablement des cibles pour les forces armées russes. Il me semble que Paris en a déjà la preuve», a déclaré la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova ce 8 mai lors de son point de presse.
Celle-ci réagissait aux propos du président français qui, le 2 mai dans The Economist, a de nouveau assumé la possibilité d’un envoi de troupes occidentales en Ukraine, notamment si Kiev venait à en faire la demande.
Les tensions se sont accumulées entre Paris et Moscou depuis le mois de janvier et l'annonce par le président français de l'envoi de 40 missiles Scalp supplémentaires à Kiev. Son refus d'exclure un envoi de troupes occidentales en Ukraine le 26 février dernier n'a rien arrangé. Le président français avait justifié ses propos en invoquant une «ambiguïté stratégique» face à Moscou qui selon lui ne se fixe aucune limite.
«Nous devons le décevoir : pour nous, la situation semble plus que certaine»
«Macron lui-même explique cette rhétorique par le désir de créer une sorte d'"incertitude stratégique" vis-à-vis de la Russie», a fait remarquer Maria Zakharova, reprenant les justifications du dirigeant français. Et celle-ci de préciser : «Nous devons le décevoir : pour nous, la situation semble plus que certaine. Nous avons déjà décidé depuis longtemps.»
La porte-parole a ensuite accusé Paris de manipuler l'opinion en évoquant une «menace militaire russe contre la France et toute l’Europe», pour justifier «des dépenses de plusieurs milliards de dollars dans la guerre hybride de l’Occident avec la Russie en Ukraine», tournant le dos à l'indépendance française pour «plaire» selon elle «aux Anglo-Saxons».
«Il est significatif que le bellicisme du propriétaire de l’Élysée soit rejeté non seulement par de nombreux alliés de l’UE et de l’OTAN, mais aussi, et surtout, par l’écrasante majorité des citoyens français», a encore taclé Maria Zakharova. «Cela ne semble pas déranger Macron. Apparemment, c’est exactement à cela que devrait ressembler la véritable "démocratie libérale", dont il réclame avec tant de zèle la protection contre les ennemis extérieurs et intérieurs», a-t-elle ajouté.
Le 6 mai, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a considéré les propos du président français, jugés belliqueux, comme l'une des causes de l'organisation prochaine d'exercices nucléaires par l'armée russe. Il a aussi évoqué les déclarations de Londres. En déplacement à Kiev le 2 mai, le ministre britannique des Affaires étrangères David Cameron a en effet soutenu les frappes que les forces ukrainiennes pourraient mener sur le sol russe avec des armes britanniques.
L’ambassadeur de France à Moscou, Pierre Lévy, a aussi été convoqué le 6 mai au ministère russe des Affaires étrangères, qui a fustigé la politique «destructrice et provocatrice» de Paris en Ukraine, conduisant selon la Russie à une escalade du conflit. Aussi a-t-elle fustigé des «déclarations de plus en plus belliqueuses» du gouvernement français. Le Quai d’Orsay, en retour, a regretté une volonté d’«intimidation» de Moscou.
L’ambassadeur français était néanmoins présent le 7 mai à l’investiture de Vladimir Poutine au Kremlin.