Qu'on l’appelle résurgence ou autre, là n’est pas le problème : la deuxième vague de Covid-19 semble arriver, peut-être par l’intermédiaire d’un virus qui a muté, qui touche plus les jeunes et dont l’agressivité est encore inconnue. La France a-t-elle vraiment profité des quelques semaines de répit que le printemps lui a laissées pour améliorer sa riposte face au virus ? On n’en est pas complètement sûr.
La deuxième vague et le risque d’un reconfinement
Une seule chose est sûre à ce stade : un nouveau confinement achèverait définitivement une économie française déjà durement frappée par la première vague. Alors que la reprise n’est pas au rendez-vous, que le chômage explose et que nos finances publiques sont au-delà de l’exsangue, une nouvelle suspension générale de l’activité économique aurait sur la prospérité nationale le même effet délétère qu’un conflit armé. On pourrait alors parler d’un véritable appauvrissement du pays, et le gouvernement serait contraint à des choix politiques très compliqués.
Optimiser la riposte au virus constitue donc un impératif de premier rang. Il faut tout faire pour éviter cette nouvelle catastrophe économique. Mais l’administration sanitaire a-t-elle réellement mis à profit sa « rémission » d’après confinement pour se préparer ?
Une doctrine du masque toujours erratique
L’un des enseignements du confinement a porté sur le masque, obligatoire ou non, utile ou non, pour lutter contre la propagation du virus. Lorsque Jérôme Salomon, toujours directeur général de la Santé, est auditionné par la commission parlementaire, on découvre que, depuis l’arrivée de Macron au pouvoir, une nouvelle doctrine est imposée de fait par l’équipe Buzyn. Elle repose sur l’idée qu’équiper la population avec des masques ne servirait à rien. Mieux vaut confiner.
Ce choix unilatéral, opéré dans le secret des cabinets ministériels, coûte aujourd’hui très cher au contribuable français : faute d’une politique de prévention avec des tests massifs comme en Allemagne, faute d’un équipement massif en masques, le virus se répand comme une traînée de poudre.
Depuis ces constats, rien n’a vraiment changé. Emmanuel Macron a expliqué il y a quelques jours qu’équiper les Français avec des masques n’était pas une mission de l’Etat. L’aveu est éloquent : la doctrine officielle imposée en 2017 n’a pas varié d’un iota.
La bureaucratie a-t-elle compris la crise ?
Sur le fond, la crise de mars et avril a montré la cécité profonde de la bureaucratie face à ses dysfonctionnements. Disons même qu’elle a illustré avec quel déni un Jérôme Salomon, une Agnès Buzyn, peuvent contester les évidences les plus frappantes, au nom d’une forme de satisfaction de soi particulièrement inquiétante.
Il y a quelques jours, le ministre Véran s’est ainsi rendu compte que l’inertie de l’AP-HP, c’est-à-dire l’inertie des hôpitaux publics parisiens, torpillait le déploiement des tests salivaires. On y verra le signal envoyé par les cols blancs qui colonisent des bureaux pléthoriques sur leur incompréhension complète de la crise et de ses défis.
Quelle capacité à imposer un nouveau confinement ?
Au-delà de ces alertes, se pose une question globale qui risque de réserver de mauvaises surprises aux pouvoirs publics. L’été montre une jeunesse bouillonnante qui fait activement circuler le virus, auquel elle est probablement plus exposée que durant la première vague. C’est particulièrement vrai dans les quartiers d’immigration maghrébine et subsaharienne où le respect des gestes barrière n’a jamais été imposé durant la première vague.
Comment ces jeunes bouillonnants réagiront-ils en cas de reconfinement, même partiel ? Les pouvoirs publics sont-ils encore en mesure d’imposer son respect effectif sans troubler fortement l’ordre public ? On a un doute.
La vague de tous les dangers politiques
Entre l’incapacité des élites administratives à se réformer et la perte de légitimité qui frappe l’Etat dans sa mission régalienne de maintien de l’ordre, la vague qui s’annonce pourrait constituer un grand péril pour l’édifice macronien. Rien n’exclut en effet que l’opinion publique ne demande des comptes très pressants à un pouvoir tout occupé à distribuer des milliards à la population pour assurer la réélection du président… mais si peu préoccupé, semble-t-il, de doter le pays d’une administration efficace.