«Certains dans l’UE sentent qu’il y a trop d’intégration», estime l’ancien président autrichien

Plusieurs facteurs expliquent la montée de l’extrême droite nationaliste en Europe. Les problèmes économiques, le chômage et la crise des réfugiés, causent le mécontentement des populations, a confié à RT l’ex-président autrichien, Heinz Fischer.

L’Union européenne n’a jamais fait face à autant de défis en même temps et n’est paradoxalement jamais restée aussi passive pour les relever. Est-ce que l’UE est devenue trop grande pour se débrouiller par elle-même ?

La présentatrice de l’émission de RT Worlds Apart, Oksana Boyko, a discuté de cette question avec l’ancien président autrichien, Heinz Fischer.

Les sentiments et philosophies nationalistes progressent

RT : La présidence que vous avez quittée en juillet dernier n’a toujours pas été pourvue. Le deuxième tour des élections a été invalidé, reporté et puis reporté à nouveau… Un candidat du Parti de la liberté, d’extrême droite, est très populaire dans les sondages. Et cela se passe après 12 ans de gouvernance centriste. Comment expliquez-vous ce changement dans l’attitude des électeurs ?

Heinz Fischer, ancien président autrichien (H.F.) : Je pense que c’est un phénomène qui touche l’ensemble de l’Europe. Regardez d’autres pays européens, tels que la France, l’Allemagne et les pays scandinaves. Des facteurs différents créent un certain mécontentement parmi la population. Cela va de pair avec l’économie, le chômage... Dans une certaine mesure c'est lié avec le problème de réfugiés. Les sentiments et philosophies nationalistes progressent. Et c’est la base de leur développement.

RT : Vous avez mentionné plusieurs facteurs qui influencent l’attitude des électeurs. Un argument récurrent, dans plusieurs campagnes, c’est «reprendre le contrôle du pays». Norbert Hofer le dit en Autriche, la campagne pour le Brexit le disait au Royaume-Uni, Donald Trump le dit aux Etats-Unis. Que dire de ce slogan qui touche autant de personnes dans des pays si différents ?

H.F. : Cela est lié au nationalisme. Les idées, les idéologies et les philosophies nationalistes étaient totalement hors-jeu. Elles ont mené à une catastrophe, la Seconde Guerre mondiale et le mouvement nazi. Le nationalisme abattu, l’idée européenne a prospéré. Et pour le moment, j’ai le sentiment que beaucoup de monde, ou du moins un certain nombre de personnes, sentent qu’il y a trop d’intégration.

Le nationalisme c’est surévaluer votre propre pays en rabaissant les autres

RT : C’est un point très intéressant parce que vous voyez le nationalisme comme quelque chose de négatif, vous avez fait référence à l’idéologie nazie. Mais la façon dont le nationalisme est perçu en Russie, par exemple, c’est seulement la défense des intérêts nationaux, mettre son pays en avant pour ce qui est de leur protection et les défendre. Ne pensez-vous pas que vous exagérez les dangers du nationalisme ? Parce que c’est une chose d’appeler à des mouvements agressifs contre d’autres pays, mais c’en est une autre de dire : «Nous avons le droit de défendre les intérêts de notre pays.»

H.F. : Tout d’abord, vous devez comprendre que je ne veux pas comparer les philosophies ou les idées actuelles avec l’idéologie nazie en tant que telle. Mais une chose est sûre, le nationalisme à mes yeux signifie rabaisser les autres pays. Le patriotisme est positif. Le nationalisme, c’est surévaluer votre propre pays en rabaissant les autres…

RT : A votre avis, pour quoi Norbet Hofer fait-il campagne en Autriche ? Mène-t-il une campagne pour le nationalisme ou pour le patriotisme ?

H.F. : Il y a trop de nationalisme, à mon sens. Parce que le jugement sur les réfugiés ou sur d’autres nations ou des gens d’Afrique est négatif et cause des préjugés, préjugés qui sont utilisés pour obtenir un avantage politique.

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