RT : Le secrétaire d’Etat américain a mis en garde contre toute déstabilisation en Syrie juste après la conclusion du cessez-le-feu à Munich. «Presque tout le monde est tombé d’accord pour dire que si d’un côté il y a une escalade, l’autre le fera aussi, et on pourrait avoir une escalade infinie entre l’Iran, les chiites, les sunnites, l’Arabie saoudite, la Turquie ou le Qatar. Tous les pays impliqués ont la capacité de tout faire échouer», a-t-il déclaré. Vraisemblablement, l’Arabie saoudite et la Turquie ne prendront pas l’initiative sans l’approbation de la coalition menée par Washington. Qu’en pensez-vous ?
Talat Masood : Bien sûr que non, je crois qu’il ne sera pas possible pour l’Arabie saoudite et la Turquie d’agir contre ce que les Américains ont décidé. J’estime qu’ils pourraient coopérer concernant l’usage de forces terrestres en Syrie, ce qui rendra les choses très compliquées et provoquerait un conflit d’intérêts. On constate déjà que la situation est très difficile dans le pays, où de nombreuses forces combattent.
Et personne ne sait exactement comment ils vont lutter indépendamment contre Daesh quand les Russes, ainsi que les Syriens et les Iraniens mènent des opérations contre ce groupe terroriste. Pourquoi ne font-ils pas une coalition avec la Russie et ne se joignent-ils pas aux efforts contre l’Etat islamique puisqu’il est l’ennemi commun ? Et en ce qui concerne l’avenir de la Syrie, laissez les Syriens décider, cela peut être fait plus tard lorsque la stabilité et la paix seront rétablies dans le pays.
RT : Riyad a envoyé des troupes au Yémen sans aboutir à des résultats positifs. Est-ce que une invasion saoudienne en Syrie pourrait remplir leurs objectifs ?
Talat Masood : Je ne pense pas, puisqu’essentiellement, c’est un problème politique et il faut avoir un règlement politique. Et c’est pour cela qu’un certain niveau de paix est requis, ainsi que de compréhension parmi les principales forces du pays et du monde, où la Russie et les Etats-Unis peuvent jouer un rôle important et j’estime qu’ils sont disposés à le faire.
Et surtout les Etats-Unis doivent comprendre que s’ils ne soutiennent pas le gouvernement syrien au moins pour un moment, jusqu’à l’établissement d’une certaine stabilité en en Syrie, cela va encore compliquer les choses. Parce que s’ils essaient de combattre et Daesh et le président Assad, il restera un grand vide et Daesh ou une autre force terroriste pourrait en profiter pour déstabiliser encore plus la Syrie et la région.
RT : L’Arabie saoudite comprend une frontière avec Irak où l’emprise de Daesh est plus grande qu’en Syrie. Ne serait-il pas plus logique de concentrer les efforts militaires sur l’Irak ?
Talat Masood : C’est vrai, mais le but majeur ici c’est qu’ils pensent que la Russie et l’Iran gagnent probablement de plus en plus de terrain en Syrie et c’est pourquoi ils veulent en quelque sorte avoir leur propre influence étendue en Syrie. C’est pour cela qu’ils ont donné leur préférence à la Syrie plutôt qu’à l’Irak.