Lors d'une session spéciale sur la situation en Ukraine, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté le 7 avril une résolution visant à suspendre la présence de la Russie au Conseil des droits de l'Homme (CDH) de l'ONU. Le texte exprime la «profonde préoccupation» de l'Assemblée générale «face à la crise humanitaire et des droits de l'Homme en cours en Ukraine, en particulier face aux informations faisant état de violations et d'atteintes aux droits de l'Homme», parfois «systématiques» et «de violations du droit international humanitaire par la Fédération de Russie».
Ce vote fait suite à l'adoption par l'Assemblée générale, le 24 mars 2022, d'«une résolution exigeant un arrêt immédiat des hostilités par la Russie contre l’Ukraine».
Pour l'adoption du document, les deux tiers des voix des participants au vote étaient nécessaires, sachant par ailleurs que les abstentions ne sont pas prises en compte. La résolution a été adoptée avec 93 pays ayant voté pour, tandis que 24 ont voté contre. 58 se sont abstenus.
Parmi les pays ayant voté contre, figure la Chine qui a dénoncé une «démarche hâtive», la mise «de l'huile sur le feu» ainsi qu'un «précédent dangereux». L'Iran, le Kazakhstan et Cuba ont aussi voté contre. Sans surprise, la Russie, la Biélorussie et la Syrie se sont opposés à la résolution proposée au scrutin, ainsi que l'a rapporté l'AFP.
Du côté des pays s'étant abstenus, on retrouve notamment l'Afrique du Sud et le Sénégal, qui jugent que la résolution «préjuge les résultats de la commission d'enquête» créée début mars par le Conseil des droits de l'Homme. Le Brésil, comme le Mexique et l'Inde, tous trois membres non-permanents actuellement du Conseil de sécurité de l'ONU, se sont également abstenus.
La Russie dénonce une résolution «politiquement motivée»
Le Kremlin a regretté sa suspension, avertissant que Moscou comptait «continuer à défendre ses intérêts par tous les moyens légaux». «Nous en sommes désolés et nous continuerons à défendre nos intérêts par tous les moyens légaux et à nous expliquer», a en effet déclaré le porte-parole de Kremlin, Dmitri Peskov, sur la chaîne britannique Sky News.
Le ministère russe des Affaires étrangères a par ailleurs considéré cette suspension comme «un geste politiquement motivé et arbitraire en vue d’ostraciser de façon démonstrative un Etat membre souverain des Nations unies qui poursuit sa politique indépendante tant à l'extérieur qu'à l'intérieur» et a décidé d'une «résiliation anticipée» de ce Conseil.
«La Russie a toujours considéré le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU comme une composante importante du système universel qui vise à défendre et promouvoir les droits de l’Homme et dont le rôle fondamental est de contribuer au développement d’un dialogue constructif et le moins politisé portant sur les questions clés de l’agenda relatif aux droits de l’Homme. Malheureusement, le Conseil est aujourd’hui de facto monopolisé par un groupe de pays qui l’utilisent à ses fins conjoncturelles», a également déploré la diplomatie russe affirmant qu'elle restait «disposée à contribuer davantage à la consolidation d'un dialogue constructif portant sur les droits de l’Homme, à faire participer tous les pays intéressés à l’élaboration et à l’adoption collectives des décisions qui répondent aux intérêts de tous les groupes de pays».
«Les représentants de la Russie avaient en amont expliqué qu'ils considéraient l'initiative comme politiquement motivée [et] lourde de conséquences dévastatrices pour le système des Nations unies», a de son côté rapporté l'agence TASS qui précise que la décision de suspendre l'adhésion de la Russie au CDH ne s'appliquerait qu'à la rotation actuelle, c'est-à-dire jusqu'à l'expiration du mandat russe actuel au conseil en 2023.
Ce vote survient au moment où la Russie est sous le feu des accusations occidentales après la diffusion d'images d'exactions perpétrées à Boutcha. Moscou a de son côté ouvert une enquête pour faire la lumière sur les faits en question. Pour l'heure, la Russie a rejeté la responsabilité qui lui a été imputée dans cette affaire et demande des «discussions internationales». Lors d'un entretien téléphonique avec le Premier ministre hongrois Viktor Orban, le 6 avril, le président russe Vladimir Poutine a évoqué une «provocation brutale et cynique du régime de Kiev dans la ville de Boutcha», selon un communiqué du Kremlin.