L'Union européenne a annoncé vouloir «interdire» les médias financés par la Russie, parmi lesquels RT et Sputnik. Parmi les voix s'élevant, notamment sur les réseaux sociaux, contre cette atteinte à la liberté de la presse, le Syndicat national des journalistes (SNJ) a réagi dans un communiqué publié ce 28 février intitulé : «On ne défend jamais la liberté en attaquant les journalistes.»
«Quelques jours après le début de l'offensive russe contre l'Ukraine, de nombreux travailleurs des médias sont aujourd'hui pris pour cibles par plusieurs puissances politiques ou militaires», écrit le syndicat évoquant les journalistes ukrainiens mais également leurs confrères en Russie qui font face, selon le SNJ, «à la censure et aux menaces à grande échelle d'un régime liberticide».
Evoquant les menaces physiques ou politiques faites à RT France, dont la rédaction est comme le rappelle le syndicat «composée très majoritairement de journalistes professionnels français passés par différents médias», le SNJ affirme : «S'en prendre ainsi à ses salariés est inacceptable.»
Si le syndicat se distance du «positionnement éditorial» de RT France, il affirme néanmoins : «Les intimidations et menaces de représailles n'ont jamais fait avancer la cause de la liberté de la presse.»
«Un acte de censure qui réduit le pluralisme de l'information»
Alors que le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a annoncé qu'une décision concernant RT et Sputnik serait prise dans les jours à venir, le SNJ déplore la confusion, «sans la moindre nuance», entre le «travail d'une rédaction [et] la politique du pays qui la finance».
Soulignant la «volonté» des journalistes composant la rédaction de RT France – comme d'autres – de «traiter l'information avec sérieux et honnêteté», le SNJ conclut : «En temps de guerre, la tentation est souvent grande de régler ses comptes en s'attaquant à des médias. S'en prendre à des journalistes, les expulser, interdire les chaînes ou les journaux dans lesquels ils travaillent constitue, quelles que soient les intentions affichées, un acte de censure qui réduit le pluralisme de l'information. Ce n'est jamais la bonne réponse.»
Le 27 février, lors d'une conférence de presse, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait affirmé : «Nous allons interdire dans l'UE la machine médiatique du Kremlin. Les médias d'Etat Russia Today et Sputnik, ainsi que leurs filiales, ne pourront plus diffuser leurs mensonges pour justifier la guerre de Poutine et pour semer la division dans notre Union. Nous développons donc des outils pour interdire leur désinformation toxique et nuisible en Europe», a déclaré Ursula von der Leyen. Un «bannissement» également promis par Josep Borrell lors d'une conférence de presse commune.
Alors que la question de la conformité d'une telle interdiction, au regard en particulier des différentes législations nationales, se pose, la présidente de RT France Xenia Fedorova avait réagi en ces termes : «La décision de bannir notre chaîne, dans laquelle travaillent 176 salariés, dont plus de 100 journalistes, est une violation de l'Etat de droit et va à l’encontre des principes mêmes de la liberté d'expression. Rien ne peut justifier cette censure.»
Les médias RT ont été maintes fois accusés par des responsables politiques européens d'être des «organes de propagandes russes», au seul motif que leur source de financement est russe. Ainsi, le président de la République française Emmanuel Macron a qualifié RT France de cette manière par le passé, au mépris du fait que les journalistes de ces médias possèdent une carte de presse française et que la chaîne RT France dispose d'une convention avec l’Arcom (ex-CSA) et n'a jamais été sanctionnée par le régulateur.
Si RT France est habituée des attaques à son égard, de la part d'activistes, médias et organisations militantes qui multiplient les amalgames, ces attaques ont gagné en ampleur ces dernières semaines, dans le contexte de la crise ukrainienne. Partant, RT France avait récemment condamné la pression politique sur l’Arcom, qui vise à nuire au média et va, selon la communication de celui-ci, «à l’encontre du socle légal visant à protéger la liberté d'expression».