Le cyclone tropical Batsirai a quitté Madagascar le 7 février en épargnant les principales villes, mais laisse dans son sillage des dizaines de milliers de sinistrés, au moins 20 morts et le «grenier à riz» du centre du pays ravagé, faisant redouter à l'ONU une aggravation de la crise humanitaire.
La grande île de l'océan Indien, qui compte une population de près de 28 millions d'habitants, était déjà sous le choc d'une tempête tropicale, Ana, qui a fait 55 morts fin janvier. «Batsirai a quitté Madagascar ce matin à 7h [4h GMT] pour sortir sur le golfe du Mozambique», a déclaré à l'AFP Jean-Benoit Manhes, représentant adjoint de l'Unicef dans le pays.
Selon le dernier bilan du Bureau national de gestion des risques et des catastrophes (BNGRC), vingt personnes sont mortes et 55 000 ont dû quitter leurs foyers endommagés ou détruits par la pluie diluvienne et les rafales de vent qui ont atteint jusqu'à 165 km/h. L'agence des Nations unies pour l'enfance craint notamment que de nombreuses victimes soient des mineurs, dans un pays, l'un des plus pauvres au monde, où ils représentent plus de la moitié de la population.
Le cyclone, qui avait précédemment atteint l'île française de la Réunion, a frappé Madagascar dans la nuit du 5 au 6 janvier, sur la côte orientale, sur une zone de 150 km de long, peu densément peuplée et agricole. A Mananjary, son épicentre, les riverains accablés ont contemplé le 6 février leur ville en lambeaux. «Où que vous alliez, tout est détruit», confiait à l'AFP Faby, un habitant. «Nous supplions le gouvernement de venir nous aider dès que possible», opinait un autre homme, Fana.
Ecoles et centres de santé soufflés par le cyclone
Le phénomène météo extrême s'est ensuite dirigé vers l'ouest, dans les terres, provoquant des crues de rivières qui ont dévasté les rizières du «grenier à riz» de Madagascar, dans le centre du pays, avant de s'affaiblir, selon l'Unicef. «L'impact du cyclone ne se termine pas aujourd'hui, il va durer plusieurs mois notamment sur l'impact agricole», a mis en garde Jean-Benoit Manhes.
La capitale Antananarivo et le principal port du pays Tamatave (nord-est) ont été cette fois épargnés, ce qui explique un bilan humain plus faible que ce qui était redouté par les autorités et les ONG, qui tablaient sur près de 600 000 personnes affectées et 140 000 déplacées.
«Les toits de plusieurs centaines d'écoles, de centres de santé ont été soufflés» dans les zones affectées, souligne toutefois l'Unicef pour qui le bilan reste lourd sur une île. Ce nouveau coup dur intervient dans le cadre d'une grave sécheresse dans le sud malgache, qui a plongé plus d'un million de personnes dans une situation de malnutrition aiguë, avec des poches de famine.
Sur son passage, Batsirai a aussi en partie détruit la principale route reliant l'île du nord au sud, «ce qui rendra difficile la fourniture d'accès et de renfort dans certains villages y compris dans les zones de sécheresse», a alerté Jean-Benoit Manhes, soulignant que «Madagascar est en crise humanitaire constante».
Quelque 10 000 Réunionnais ont été privés d'électricité le 6 février, trois jours après le passage de Batsirai sur l'île, qui a blessé douze personnes et causé l'échouage d'un pétrolier. Le 6 février également, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a déclaré lors d'un sommet des dirigeants africains que le continent «subissait les pires impacts des phénomènes liés au réchauffement climatique tels que les sécheresses, les inondations et les cyclones». «Bien qu'ils ne soient pas responsables de la cause du changement climatique, ce sont les Africains qui en supportent à la fois le poids et le coût», a-t-il déclaré.