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Mali : l'ambassadeur de France sommé par les autorités de quitter le territoire sous 72 heures

Les autorités maliennes ont décidé d'expulser l'ambassadeur de France, dans une nouvelle escalade des tensions entre Bamako et Paris, a annoncé ce 31 janvier la télévision d'Etat. Le Quai d'Orsay a «pris note» de la décision.

«Le gouvernement de la République du Mali informe l'opinion nationale et internationale que ce jour [...] l'ambassadeur de France à Bamako, son excellence Joël Meyer, a été convoqué par le ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale [et] qu'il lui a été notifié la décision du gouvernement qui l'invite à quitter le territoire national dans un délai de 72 heures», a annoncé ce 31 janvier un communiqué lu par la télévision publique.

Les autorités maliennes ont justifié cette décision par les récentes déclarations «hostiles» de responsables français à leur encontre. Cette convocation marque un nouveau durcissement des tensions entre le Mali et la France, l'ancienne puissance coloniale engagée militairement au Mali et au Sahel depuis 2013. Les relations n'ont cessé de se détériorer depuis que des colonels ont pris par la force en août 2020 la tête de ce pays plongé depuis 2012 dans une profonde crise sécuritaire et politique.

Paris «prend note» de l'expulsion de son ambassadeur

«La France prend note de la décision des autorités de transition [maliennes] de mettre fin à la mission de l'ambassadeur de France au Mali. En réaction, la France a décidé de rappeler son ambassadeur», a indiqué le Quai d'Orsay ce 31 janvier.

Paris exprime aussi «sa solidarité vis-à-vis de ses partenaires européens, en particulier du Danemark», dont le contingent arrivé dans le cadre de l'opération  internationale antidjihadiste Takuba vient d'être expulsé par les autorités maliennes «sur la base de motifs infondés».

Le communiqué rappelle aussi la «solidarité» de Paris à l’égard de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) dont le représentant au Mali a lui aussi été expulsé, ainsi que «son engagement en faveur de la stabilisation et du développement du Sahel, aux côtés de ses partenaires de la Coalition pour le Sahel».

Pour la France, le pouvoir de transition malien est «illégitime»

Le 28 janvier sur la radio RTL, Jean-Yves Le Drian avait reproché aux militaires au pouvoir de manquer de légitimité. «C'est la junte [...] qui [a] pris le pouvoir et qui [a] fait un double coup d'Etat depuis août 2020 qui est illégitime», a ainsi déclaré le chef de la diplomatie française, reprochant au gouvernement malien sa volonté de reporter l'organisation des élections au nom de considérations sécuritaires.

Le ministre des Affaires étrangères avait également dénoncé des liens présumés entre le pouvoir malien et la Russie. «Il y a un autre aspect très préoccupant, [c'est] la rupture du cadre militaire, on voit le Mali faire appel à une milice privée russe proche de Poutine qui se sert directement sur les ressources propres du Mali», avait lancé Jean-Yves Le Drian, en dépit d'un récent démenti de Bamako concernant un déploiement de la société de sécurité privée Wagner. 

Les tensions se sont récemment accrues entre Paris et Bamako. Le 26 janvier, le ministre et porte-parole du gouvernement malien Abdoulaye Maïga avait ainsi donné pour «conseil» de se taire à la ministre française des Armées Florence Parly, après que celle-ci a accusé les autorités maliennes de multiplier les «provocations».

Pour rappel, les relations entre Paris et Bamako se sont fortement détériorées depuis que les militaires au pouvoir ont décidé de repousser la date prévue des élections qui auraient ramené les civils à la tête du Mali. Ils ont fait valoir qu'il était actuellement impossible d'appeler les Maliens aux urnes du fait de l'insécurité persistante sur un territoire dont les deux tiers échappent au contrôle des autorités. Les militaires au pouvoir réclament le temps de mener à bien des réformes essentielles selon eux et d'organiser des élections incontestables. Outre la France, la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) a réagi à cette décision, en infligeant de sévères sanctions au Mali.