Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a affirmé ce 11 novembre que son pays répondrait à toute nouvelle sanction européenne liée à la crise des migrants à la frontière entre son pays et la Pologne. «S'ils nous imposent de nouvelles sanctions [...], nous devons répondre», a-t-il affirmé, cité par l'agence de presse Belta, évoquant notamment la possibilité de suspendre le fonctionnement d'un gazoduc qui traverse la Biélorussie et livre du gaz russe vital pour les Européens.
J’ai écouté ces ordures, qui sont complètement dénués de cervelle
«Je recommanderais aux dirigeants polonais, lituaniens et autres écervelés de réfléchir avant de parler», a prévenu le chef de l'Etat. «On cherche trop souvent à nous intimider avec un cinquième paquet [de sanctions]. La Pologne nous menace de fermer la frontière. Allez-y, fermez-la : moins de fugitifs s’y rendront [...] J’ai écouté ces ordures, qui sont complètement dénués de cervelle», n'a également pas hésité à lancer le président biélorusse, avant d'envisager de bloquer le transit par la Biélorussie du gazoduc transnational Yamal-Europe, et en rappelant que, récemment, le volume du transit de gaz de la Russie vers l’ouest avait considérablement augmenté. «Nous chauffons l’Europe, et eux, ils nous menacent de fermer la frontière. Et si on bloque le transit du gaz naturel vers là-bas ? [...] C’est leur affaire. S’ils ferment la frontière, ainsi soit-il», a affirmé Alexandre Loukachenko.
De son côté, le chef de la diplomatie biélorusse Vladimir Makeï a soutenu ce 11 novembre que l'Union européenne refusait de discuter de la crise en cours à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie, où plusieurs milliers de migrants sont bloqués.
Dans une interview à l'agence de presse RIA Novosti, Vladimir Makeï a affirmé que l'UE avait coupé en 2020 ses financements à Minsk pour renforcer ses infrastructures à la frontière et construire des lieux d'accueil pour migrants. En réaction, Minsk a cessé de respecter un accord avec Bruxelles pour la réadmission en Biélorussie de migrants entrés illégalement dans l'UE depuis son territoire.
Minsk dénonce une «politique irréfléchie» de la part de l'UE
«Nous avons proposé à l'UE de mener des consultations sur ce sujet, mais nous avons essuyé un refus. Depuis, nous avons proposé à maintes reprises d'entamer un dialogue sur cette problématique, mais n'avons pas reçu de réponse positive», a dit Vladimir Makeï. Il a également estimé que la crise migratoire actuelle était le résultat «de la politique irréfléchie» de Bruxelles qui, selon lui, a «invité les réfugiés et déclaré qu'elle était prête à les accueillir». Le ministre a aussi assuré que Minsk était favorable à un règlement de cette crise «dans les plus brefs délais».
Depuis le 8 novembre, les tentatives de passage en Pologne depuis la Biélorussie de centaines de migrants, originaires principalement du Proche-Orient, ont déclenché une grave crise. Varsovie a déployé 15 000 soldats dans la zone, en plus de policiers et de garde-frontières.
Quelques milliers de migrants, essentiellement originaires du Moyen-Orient, sont massés à cette frontière côté biélorusse, et souhaitent pénétrer sur le sol polonais. La Pologne accuse la Biélorussie – mais aussi la Russie – d'orchestrer cette vague migratoire à sa frontière, qu'elle qualifie d'«attaque». Les Européens affirment depuis des semaines que le président biélorusse Alexandre Loukachenko délivre des visas à des migrants et les achemine à la frontière en représailles aux sanctions européennes.
Minsk a dénoncé des accusations «sans fondements» et considère que la Pologne et ses alliés occidentaux font monter délibérément la tension pour prendre des sanctions à son encontre. Les gardes-frontières biélorusses ont également déclaré que les forces polonaises avaient fait usage de gaz lacrymogène et exercé une «pression psychologique» sur les migrants, notamment en utilisant des haut-parleurs et des projecteurs en pleine nuit.
De son côté, Moscou a dénoncé «une déclaration totalement irresponsable et inacceptable» du chef du gouvernement polonais. «Nous sommes en présence d'une catastrophe humanitaire imminente dans le contexte de la réticence de nos collègues européens à démontrer leur attachement aux valeurs européennes. Ils ont manifesté cet attachement à l’égard de différents pays, à l’égard des réfugiés de différents pays, en évoquant les idéaux suprêmes de l’humanisme. Cette fois, une telle volonté est absente», a estimé le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov lors d'une conférence de presse le 10 novembre.