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Des données confidentielles des services secrets britanniques bientôt hébergées chez Amazon ?

Le Royaume-Uni pourrait très bientôt confier certaines de ses données confidentielles à l'hébergeur AWS, filiale d'Amazon. Une nouvelle qui pose question quant à la souveraineté nationale et aux relations entre l'Etat et les entreprises privées.

L'entreprise américaine Amazon, par l'intermédiaire de sa filiale d'informatique dématérialisée AWS, aurait passé un contrat de stockage de données confidentielles avec les services secrets britanniques, explique le Financial Times le 26 octobre, citant des sources proches du dossier.

Le contrat serait destiné notamment à doper l'analyse de données et l'intelligence artificielle pour l'espionnage par le service britannique de renseignements électroniques GCHQ et les agences de services secrets MI5 et MI6 ou d'autres services du ministère de la Défense lors d'opérations conjointes, ajoute le quotidien financier.

Son montant serait estimé entre 500 millions de livres et un milliard de livres sur la prochaine décennie, d'après des sources du Financial Times, qui précise que les données sont censées être détenues au Royaume-Uni, et qu'Amazon n'y aurait pas accès. Sollicités par l'AFP, Amazon, le ministère de la Défense et le GCHQ n'ont pas souhaité commenter la nouvelle.

Un porte-parole du gouvernement a toutefois fait valoir lors d'un briefing avec des journalistes que le Royaume-Uni avait «utilisé des technologies du secteur privé pour des applications à la sécurité nationale depuis des décennies». «Et de toute évidence assurer la sécurité de cette technologie est une priorité absolue, les mêmes protections sont appliquées aux informations confidentielles quelque soit le fournisseur de la technologie utilisée», a-t-il ajouté.

Le débat sur l'hébergement des données confidentielles relancé ?

Ces informations pourraient relancer le débat sur la souveraineté du Royaume-Uni sur ses activités stratégiques, alors que le gouvernement serait notamment en train d'envisager d'exclure le chinois CGN du projet de centrale nucléaire Sizewell C, après avoir exclu l'équipementier télécoms Huawei du réseau 5G du pays.

Alan Woodward, professeur de sécurité informatique à l'université du Surrey, a estimé sur Twitter que les données sur le renseignement «[représentaient] à présent des volumes tellement énormes que pour la rapidité de recherche elles seraient probablement mieux gérées par une société comme AWS».

Aux Etats-Unis, un rapport publié en septembre par des associations révélait que Microsoft, Amazon, Google, Facebook et Twitter ont touché plus de 44 milliards de dollars grâce à des contrats passés avec le gouvernement américain dans le cadre de «la guerre contre le terrorisme» menée après les attentats du 11 septembre 2001.

L'Europe et notamment la France s'inquiètent de confier les données sensibles, comme notamment les données personnelles sur la santé des citoyens, aux géants américains du numérique.

Le gouvernement français cherche à promouvoir des «clouds de confiance», utilisant la technologie des géants américains mais exploités par des sociétés européennes, dans des centres de données situés en Europe. Google et Thales ont annoncé un accord en ce sens début octobre, quelques mois après une annonce voisine de Microsoft avec un tandem Orange Capgemini.