Le torchon brûle entre Paris et Alger depuis la prise de parole d'Emmanuel Macron le 2 octobre devant des descendants de protagonistes de la guerre d'Algérie. Alors que les réactions se multiplient côté algérien, le ministre des Affaires religieuses Youcef Belmehdi s'est montré particulièrement virulent, le 4 octobre, à l'égard de la France et de son président.
Le peuple français «mangeait des rats», selon le ministre
Comme le rapporte le site d'information TSA, Youcef Belmehdi n'a pas hésité à déclarer devant la presse à propos de la France qu'à l'époque de la colonisation, l'Algérie «nourrissait cette contrée dont le peuple criait famine et mangeait des rats».
Selon lui, les déclarations d'Emmanuel Macron sont guidées par «la haine» et ont pour but de «freiner l’envol économique de l’Algérie». «Ton ennemi veut toujours que tu sois à sa merci. Il ne veut pas que tu accèdes à la souveraineté alimentaire», a-t-il ajouté, accusant le colonialisme français d'être en partie responsable du retard que connaît l'Algérie dans son développement économique.
«Beaucoup disent que l’Algérie a reculé ces deux ou trois dernières années. Celui qui nous a freinés c’est celui que tu soutiens», a-t-il enfin conclu, accusant certains acteurs, sans les nommer, de bénéficier du soutien de la France pour mettre en place une stratégie qui consisterait à retarder le développement algérien.
Le ministre des Affaires religieuses n'a pas été le seul à réagir le 4 octobre. De son côté, toujours cité par TSA, le Premier ministre Aïmene Benabderrahmane a lui qualifié, lors d'un déplacement à Oran, les propos d'Emmanuel Macron d'«inacceptables». «Nous n'acceptons pas ce genre de déclarations, l'Algérie c'est un peuple, une nation debout, ayant fait ses preuves dans l'histoire [...] L'Algérie est plus grande que toutes les déclarations qui tentent de porter atteinte à son histoire, à la profondeur de son histoire et ses racines», a-t-il encore fait savoir.
Emmanuel Macron évoque des «relations vraiment cordiales» avec le président algérien
Mais ces prises de parole pour le moins vindicatives n'ont pas semblé atteindre le président français, qui a évoqué dans une interview donnée à France Inter le 5 octobre les «relations vraiment cordiales» qu'il entretient, selon lui, avec le président Abdelmadjid Tebboune.
«Mon souhait, c'est qu'il y ait un apaisement parce que je pense que c'est mieux de se parler, d'avancer [...] J'ai le plus grand respect pour le peuple algérien et j'entretiens des relations vraiment cordiales avec le président Tebboune», a-t-il fait valoir sur la radio publique.
A écouter Emmanuel Macron, les relations seraient donc au beau fixe avec la présidence algérienne. Une situation qui ne semble pas aussi claire de l'autre côté de la Méditerranée, puisqu'après les déclarations du président français le 2 octobre, l'Algérie avait décidé de rappeler son ambassadeur en France dans la journée.
«A la suite des propos non démentis que plusieurs sources françaises ont attribué nommément au président de la République française, l'Algérie exprime son rejet catégorique de l'ingérence inadmissible dans ses affaires intérieures que constituent lesdits propos», avait expliqué la présidence algérienne dans un communiqué officiel.
Le lendemain, l'Algérie avait décidé d'interdire le survol de son territoire aux avions militaires français qui l'empruntent habituellement pour se rendre sur les lieux de l'opération Barkhane afin d'y combattre les djihadistes.
D'après Le Monde, Emmanuel Macron avait estimé le 2 octobre qu'après son indépendance, en 1962, l'Algérie s'était construite sur «une rente mémorielle», entretenue par «le système politico-militaire». Il avait également critiqué «une histoire officielle totalement réécrite» qui «ne s'appuie pas sur des vérités» mais sur «un discours qui repose sur une haine de la France». Des déclarations qui ont donc provoqué le courroux d'Alger et plongé les deux pays dans une importante crise diplomatique.