Le chef de la diplomatie de l'Union européenne estime qu'il est «impossible» pour l'Europe d'évacuer tous ses alliés afghans de Kaboul d'ici la fin août. La cause ? Pour Josep Borrell, les mesures de sécurité appliquées par les troupes américaines à l'aéroport de la ville empêchent les évacuations européennes.
«Le problème est l'accès à l'aéroport. Les mesures de contrôle et de sécurité des Américains sont très fortes. Nous nous sommes plaints. Nous leur avons demandé de montrer plus de flexibilité. Nous n'arrivons pas à faire passer nos collaborateurs», a-t-il confié lors d'un entretien à l'AFP le 21 août.
Près d'une semaine après la chute de Kaboul aux mains des Taliban, les Etats-Unis et d'autres pays occidentaux continuent d'essayer d'évacuer leurs citoyens de l'aéroport international Hamid Karzaï, qui est la seule voie de traversée entre l'Afghanistan et l'Occident, mais qui est devenu le théâtre de scènes de chaos. Depuis plusieurs jours, des milliers d'Afghans désespérés ont pris d'assaut les pistes de décollage, tentant de monter à bord des avions de transport américains par tous les moyens. L'aéroport est désormais encerclé par les troupes américaines, avec des Taliban à l'extérieur.
Si les Américains partent...
La délégation de l'UE a Kaboul compte environ 400 collaborateurs afghans et leurs familles. Elle a promis de les évacuer, mais 150 seulement sont à ce jour arrivés en Espagne. «Il s'agit des collaborateurs actifs. Mais le nombre des Afghans qui ont travaillé avec nous au cours de ces 20 années est beaucoup plus important», a souligné Josep Borrell. «Kaboul compte deux aéroports. L'aéroport civil est entre les mains des Taliban et aucun vol ne part. Les Américains contrôlent l'aéroport militaire. Les avions embarquent les gens qui sont sur le tarmac. Dans l'avion qui est arrivé à Madrid aujourd'hui, un tiers des passagers sont américains», a-t-il précisé.
Si les Américains partent, les Européens n'ont pas la capacité militaire d'occuper et de sécuriser l'aéroport militaire
L'administration américaine a fixé au 31 août la date du retrait définitif de ses forces d'Afghanistan et prévoit d'évacuer plus de 30 000 Américains et civils afghans d'ici là. «C'est mathématiquement impossible», insiste Josep Borrell dans cet entretien. Sans compter que cela compliquerait les évacuations européennes. «Si les Américains partent, les Européens n'ont pas la capacité militaire d'occuper et de sécuriser l'aéroport militaire et les Taliban prendront le contrôle», a-t-il affirmé. Les Américains, avec les Britanniques, ont déployé 6 000 militaires pour contrôler l'aéroport militaire.
Discuter avec les Taliban
Josep Borrell se veut donc pragmatique et juge nécessaire de discuter avec les Taliban. «Si vous voulez faire sortir votre "staff", il faut discuter avec les Taliban», a-t-il expliqué. «Tout le monde cherche à passer des accords avec les Taliban. Nous avons des contacts avec les Taliban, mais pas avec les dirigeants», a-t-il précisé. «Parler ne veut pas dire reconnaitre», a-t-il cependant insisté.
«Mais il sera impossible de faire sortir de Kaboul tous les Afghans qui ont besoin de protection. C'est impossible. C'est inimaginable», a-t-il averti. «Il ne faut pas raconter d'histoires. Il y a des priorités. Nous voulons faire sortir nos ressortissants et les collaborateurs afghans», a-t-il conclu.