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«Aidons à sauver des vies» : le fabricant du Spoutnik V répond au régulateur brésilien

Alors que l'agence de régulation sanitaire du Brésil s'est opposée à la demande de plusieurs Etats du pays d'importer le Spoutnik V, le fabricant du vaccin russe a dénoncé une décision politique, influencée par Washington.

L'agence de régulation sanitaire du Brésil (Anvisa) a interdit le 26 avril l'importation du vaccin russe Spoutnik V contre le Covid-19, dont plusieurs Etats du pays avaient fait la demande, estimant manquer de données pour s'assurer de sa sûreté et de son efficacité.

«Jamais nous ne permettrons que des millions de Brésiliens soient exposés à des produits sans une vérification appropriée de la qualité, de l'innocuité et de l'efficacité ou, au minimum, face à la situation grave que nous traversons, qu'il existe un rapport favorable entre le risque et les avantages», a déclaré Antonio Barra Torres, président de l'Anvisa.

La direction de l'agence a suivi la recommandation de ses experts constatant ce qu'ils considèrent être des «incertitudes» sur le vaccin, qui n'a toujours pas été approuvé par les agences sanitaires de l'Union européenne (EMA) et des Etats-Unis (FDA). Le refus d'importer Spoutnik V n'implique toutefois pas une analyse définitive du vaccin, et l'Anvisa, qui a reçu une demande fin mars pour l'utilisation d'urgence de la formule russe, n'a pas publié ses conclusions invoquant le manque d'informations.

«Sauver des vies est plus important que les barrières et la politique»

La réponse du fabricant du vaccin russe ne s'est pas fait attendre : «Chère Anvisa, nous n'avons pas de temps à perdre – commençons à sauver des vies au Brésil. Ensemble. Spoutnik V a été autorisé dans 61 pays, couvrant une population de plus de 3 milliards de personnes. Des tests cliniques dans 5 pays et la vaccination dans le monde réel dans plus de 40 pays ont montré que Spoutnik était l'un des vaccins les plus sûrs et les plus efficaces au monde.»

Le fabricant, qui rappelle que plusieurs pays ont publiquement partagé des données selon lesquelles Spoutnik V «est le choix le plus sûr», souligne par ailleurs que «sauver des vies est plus important que les barrières et la politique». Il estime en effet que Washington n'est pas étranger à la décision de l'agence de régulation sanitaire du Brésil : «Le ministère de la Santé des Etats-Unis, dans son rapport annuel 2020 il y a plusieurs mois, a déclaré publiquement que l'attaché sanitaire des Etats-Unis "avait persuadé le Brésil de rejeter le vaccin russe Covid-19".»

Dans son rapport annuel publié en mars et cité par plusieurs médias, le département de la Santé américain avait relevé, dans un paragraphe titré «combattre les influences malignes dans les Amériques», que des efforts ont été entrepris «pour persuader le Brésil de rejeter le vaccin russe», sans plus de précisions.

Accusant à demi-mot les Etats-Unis, Moscou avait alors dénoncé l'existence d'une campagne «égoïste» engageant différents pays à ne pas avoir recours au vaccin russe. «Nous sommes catégoriquement opposés à de telles pressions, catégoriquement contre la concurrence entre vaccins, nous considérons que nous devons unir nos efforts pour qu'un maximum de personnes puisse bénéficier de la vaccination», avait expliqué le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov. «De telles tentatives égoïstes pour forcer des pays à renoncer à quelque vaccin que ce soit n'ont pas d'avenir, cela va à l'encontre de l'intérêt de chacun», avait-il ajouté.

Dans un communiqué publié ce 27 avril, le Fonds souverain russe (RDIF), qui a financé le développement du Spoutnik V, a déploré que cette décision ait été prise «malgré l'approbation du ministère brésilien de la Science, qui a reconnu la fiabilité du vaccin Spoutnik V et a permis sa production dans le pays [et] en dépit de l'accord conclu par le ministère brésilien de la Santé pour les livraisons du vaccin». La décision du régulateur brésilien doit être réexaminée par la Cour suprême brésilienne cette semaine.

Le Spoutnik V est déjà utilisé dans plusieurs pays outre la Russie, comme le Mexique, l'Argentine ou le Venezuela. Selon l'institut Gamaleïa, qui a créé cette formule, elle a déjà été autorisée par plus de 60 pays. En février, la revue médicale The Lancet a rapporté que le vaccin russe était efficace à 91,6%, dissipant les doutes quant à sa fiabilité.