180 personnes, dont des étrangers, qui étaient piégées depuis trois jours dans un hôtel au Mozambique après une attaque de groupes jihadistes, ont été évacuées le 26 mars. Ils y ont passé plus de 48 heures terrifiantes, assiégés sans savoir s'ils seraient secourus, dans le boucan des hélicoptères survolant la zone. Certaines ont ensuite été tuées dans une embuscade, a appris au lendemain l'AFP auprès d'une source de sécurité.
Les détails sur l'évacuation restaient confus. La communication par téléphone portable dans cette zone du nord-est du pays limitrophe de la Tanzanie, à proximité de la zone abritant un méga-projet gazier auquel participe le groupe français Total, est particulièrement aléatoire depuis le début de l'attaque, le mercredi 24 mars.
Des groupes djihadistes ont lancé une attaque surprise durant l'après-midi dans la petite ville de Palma, faisant fuir des gens terrifiés vers la forêt environnante, tandis que des travailleurs du site, parmi lesquels des expatriés et des fonctionnaires mozambicains, se réfugiaient dans l'hôtel Amarula.
Un premier groupe de 80 personnes a quitté l'hôtel à bord de camions de l'armée le 26 mars, selon la source de sécurité qui participe à ces opérations. Mais «le convoi de 17 camions a été attaqué peu après avoir quitté l'hôtel».
«Plusieurs personnes ont été tuées, mais la plupart ont réussi à s'échapper», a affirmé cette source, précisant que seuls sept des camions étaient arrivés à sortir de la zone de combats, le parcours des autres restant inconnu. Il y aurait au moins sept morts selon la presse locale, un bilan impossible à confirmer dans l'immédiat.
La centaine d'autres assiégés a quitté l'hôtel à pied pour rejoindre la plage. Les militaires les ont trouvés là au milieu de la nuit et les ont évacués en bateau.
«Les combats se poursuivent et plusieurs équipes militaires continuent les recherches pour tenter de sauver les personnes qui étaient à bord des camions attaqués», a encore précisé cette source.
Presque tout a été détruit et beaucoup de gens sont morts
Le gouvernement mozambicain ne s'est pas exprimé publiquement depuis le 25 mars, quand il a annoncé répliquer militairement à l'attaque. Un responsable militaire interrogé par l'AFP n'a pas souhaité donner de précisions, mais a affirmé que le ministre de la Défense s'exprimerait prochainement.
A Palma, «presque tout a été détruit et beaucoup de gens sont morts», a indiqué à l'AFP un salarié du site gazier par téléphone après avoir été évacué, sans être en mesure de donner de détails sur les victimes ou leur nationalité.
Le 26 mars, des hélicoptères avaient survolé la zone pour tenter de trouver un corridor pour évacuer les assiégés de l'hôtel, selon plusieurs sources.
Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux – qui n'a pas pu être vérifiée –, l'un des assiégés, un homme visiblement ému, qualifiait en portugais la situation de «critique»: «Nous ne savons pas si nous allons être sauvés», le voit-on dire face à son téléphone portable, comme un SOS.
Le 28 mars, le gouvernement mozambicain a finalement annoncé que plusieurs dizaines de personnes ont été tuées au cours de l'attaque djihadiste. Sept personnes ont trouvé la mort dans une embuscade alors que les forces de sécurité tentaient d'évacuer près de 200 personnes retranchées dans un hôtel de la ville portuaire tombée aux mains de groupes armés, a précisé le ministère de la Défense lors d'une conférence de presse.
Une attaque lancée le jour où Total annonçait reprendre des travaux
L'attaque a été lancée le jour même où Total annonçait la reprise des travaux de construction sur le site, suspendus depuis le début de l'année en raison de l'insécurité sévissant dans la zone. Mais selon plusieurs experts, les préparatifs nécessaires pour mener une attaque d'une telle ampleur écartent l'hypothèse d'une réplique à cette annonce.
La remobilisation du projet qui était envisagée en début de semaine est bien sûr suspendue
Le géant énergétique français, qui «ne déplore pas de victime» sur le site d'Afungi, a pris la décision de «réduire au strict minimum le personnel» du site pour des raisons de sécurité.
«La remobilisation du projet qui était envisagée en début de semaine est bien sûr suspendue», a ajouté Total dans un communiqué samedi soir.
Palma est située plus de 1 800 km au nord de la capitale Maputo, dans la province musulmane du Cabo Delgado où les autorités sont confrontées à une violente guérilla depuis plus de trois ans.
Les attaques de ces djihadistes armés, connus sous le nom d'Al-Shabab («les jeunes» en arabe) et qui ont fait allégeance au groupe Etat islamique (EI) en 2019, avaient faibli ces derniers mois, une accalmie jusque-là imputée à la riposte militaire.
Le conflit a fait au moins 2 600 morts, dont plus de la moitié de civils, selon l'ONG Acled. Il a également forcé plus de 670 000 personnes à quitter leur foyer, d'après l'ONU.